Mali/nouveau gouvernement: l’opposition regrette que les groupes armés ne soient pas représentés

Mali/nouveau gouvernement: l’opposition regrette que les groupes armés ne soient pas représentés©Capture d'écran du site de Studio Tamani
La cité administrative à Bamako
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 Moins d’une semaine après sa nomination par le président Ibrahim Boubacar Keïta, le nouveau Premier ministre malien Abdoulaye Idrissa Maïga a publié le 11 avril la liste des membres de son équipe gouvernementale. L’opposition, qui s’attendait à un gouvernement de large ouverture, après la Conférence d’entente nationale, regrette que les groupes armés, acteurs incontournables pour la pacification du nord du pays, ne soient pas représentés au sein du nouvel exécutif.

La nouvelle équipe gouvernementale comprend 35 ministres, soit quatre de plus que la précédente. Plusieurs portefeuilles clés, comme les Finances et les Affaires étrangères, ne changent pas de mains. Parmi les nouveaux venus, figure Maouloud Ben Katra, secrétaire général adjoint de la principale centrale syndicale du pays, nommé au ministère de l'Emploi et de la formation professionnelle. La présidente de la Coordination des associations et ONG féminines (CAFO), Oumou Touré, devient ministre de la Promotion de la femme. Au nombre des nouvelles figures, il faut aussi mentionner le secrétaire général du parti présidentiel, le Rassemblement pour le Mali (RPM), Baber Gano, qui se voit confier le ministère des Transports. La nomination de Ben Katra et Oumou Touré est interprétée comme une tactique visant à mettre fin à la grogne sociale marquée par des mouvements de grève dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Donc, une façon de préparer la réélection du président « IBK » l’année prochaine. La présence au gouvernement de Baber Gano, aux côtés de responsables d’autres partis alliés au RPM, rentre dans le même plan de campagne électorale pour 2018, selon les observateurs.

« Une grande déception »

Pour Soumaila Cissé, président de l’Union pour la République et la démocratie (URD) et chef de file de l’opposition, « c’est une grande déception » dans la mesure où après la « Conférence d’entente nationale » qui s’est tenue du 27 mars au 2 avril à Bamako, les Maliens s’attendaient à un gouvernement de large ouverture, capable de faire avancer la mise en œuvre de l’Accord d’Alger censé ramener la paix dans la partie septentrionale du pays. Signé en mai - juin 2015 par le gouvernement malien et les mouvements progouvernementaux regroupés au sein de la Plateforme ainsi que par la Coordination des mouvements de l’Awazad (CMA), une coalition de groupes rebelles à dominante touareg, l’Accord prévoit notamment la mise en place, dans les trois mois suivant sa conclusion, d’autorités intérimaires dans le nord du Mali. Mais, deux ans après la signature de ce texte, gouvernement et groupes rebelles ne sont toujours pas parvenus à un compromis pour l'administration intérimaire de Tombouctou et Taoudéni. Dans les autres régions concernées, les institutions intérimaires ont pu être mises en place, non sans difficultés.

« Après la Conférence d'entente nationale, on s'attendait à un gouvernement qui allait être résolument engagé pour faire face aux défis. Le président a dit que tout le monde était dans le train, mais ce qu'on constate est que la CMA et la Plateforme sont descendues à la plus prochaine gare qu'elles ont trouvée », réagit Soumaila Cissé, interrogé par Studio Tamani. Il estime que l’absence de représentants de ces groupes armés dans la nouvelle équipe ministérielle « est manifestement un échec ». Pour lui, le fait que « tous les chefs des partis politiques alliés au RPM sont membres du gouvernement et à des postes importants » suffit pour montrer que « le choix a été fait juste pour préparer l'élection présidentielle ».

Pas en tant que simple « figurant »

Du côté de la CMA, l’on veut tout de même espérer que le nouveau gouvernement imprimera une nouvelle dynamique à la mise en œuvre de l'Accord d'Alger. « Notre plus grande attente, c'est qu'il impulse une nouvelle dynamique à l'Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d'Alger », indique Ilad Ag Mohamed, porte-parole de la CMA, sans cacher que son mouvement avait refusé d’entrer au gouvernement en tant que simple « figurant ».
Pour sa part, la Plateforme, bien que sans représentant dans le nouveau gouvernement alors qu’elle avait présenté une liste de candidats, se montre très optimiste. « J'ai la pleine confiance en la personne du Premier ministre, je le connais bien (…) Ma préoccupation, c'est d'abord faire avancer l'Accord, avancer sur le cantonnement des groupes armés et le processus de DDR (ndlr : Désarmement, Démobilisation, Réinsertion), l'installation des autorités intérimaires là où elles doivent être installées », déclare Fahad Ag Almahmoud, porte-parole de la Plateforme. Attendue ce jeudi 13 avril après plusieurs reports, l'installation des institutions de transition à Tombouctou vient d'être à nouveau renvoyée sine die.

Le nouveau Premier ministre Abdoulaye Idrissa Maïga, succède à Modibo Keïta, qui était en poste depuis janvier 2015. Précédemment ministre de la Défense, Abdoulaye Idrissa Maïga, aujourd’hui âgé de 59 ans, devient ainsi le quatrième Premier ministre d'Ibrahim Boubacar Keïta, depuis l’élection de ce dernier en 2013.