La semaine de la justice transitionnelle : victoire du droit en Bosnie, réintégration des jeunes filles enrôlées de force en RD Congo

La semaine de la justice transitionnelle : victoire du droit en Bosnie, réintégration des jeunes filles enrôlées de force en RD Congo©
Une jeune fille échappée d'une milice dans le Sud Kivu en République démocratique du Congo
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La condamnation par le Tribunal Pénal pour la Yougoslavie (TPYR) du général Ratko Mladic le chef militaire des Serbes de Bosnie-Herzégovine a été universellement saluée comme une victoire du droit et de la justice internationale. Le général a été reconnu coupable de génocide à Srebrenica, de crimes contre l’humanité pour l’épuration ethnique des villes de Bosnie et du siège de Sarajevo, et de crimes de guerre pour la prise en otage de personnels des Nations unies pour empêcher l’intervention de l’Otan durant la guerre de Bosnie il y a 25 ans. Seuls des nationalistes serbes et la Russie ont critiqué ce jugement qui clôt les activités du TPYR.

Les 1800 pages de ce jugement sont aussi des pages pour l’histoire. Stéphanie Maupas, correspondante de www.justiceinfo.net à la Haye, écrit, «  ce jugement relate des dizaines de parcours dramatiques dans la guerre de Bosnie-Herzégovine (1992-1995) qui a fait plus de 100 000 morts et dont les survivants sont venus déposer à la barre du tribunal lors des quatre années du procès de Ratko Mladic ».

Le tribunal détaille aussi les liens étroits entre le général Mladic et le pouvoir serbe, notamment le Président Slobodan Milosevic mort en détention en 2006 durant son procès.

Un chercheur de l’Université de Lille, Loïc Trégourès, explique : « Nous savons grâce aux enquêtes du TPIY qui a fait quoi à qui, où, comment et avec qui, un degré de précision remarquable ». Selon l’universitaire, « juges et procureurs sont parvenus à crédibiliser le TPIY, lui donner des règles, des objectifs, des ambitions.

Ces succès ne sont pas sans ombre. De nombreux acquittements de responsables de la machine de guerre par ce même TPIY restent contestés en droit et devant l’histoire.

Il reste, écrit Loïc Trégourès, que « ce tribunal est un pionnier en matière de justice internationale. Il est la preuve de la possibilité de juger des criminels de guerre, y compris des chefs d’État. Il a ouvert la voie au Tribunal pour le Rwanda, à la Cour pénale internationale (CPI), et à la pratique, aujourd’hui courante, de traduire – ou du moins d’avoir l’espoir plus tout à fait utopique – de pouvoir un jour traduire en justice des criminels de guerre d’où qu’ils viennent ».

Le TPYR a-t-il pour autant contribué à la paix et à la réconciliation dans les Balkans toujours en proie à des divisions entre communautés, peuples et confessions ? Quelques manifestations de soutiens au général condamné se sont ainsi tenues en Serbie alors que parents des victimes saluaient le jugement en Bosnie-Herzégovine.

Dans une longue interview à www.justiceinfo.net, le procureur du Tribunal, Serge Brammetz reconnaissait les limites de son action. « On voit malheureusement que parmi les nouvelles générations, il y a une attitude de haine, là où on aurait pu espérer que la génération actuelle des hommes politiques allait dire l’inverse : plus jamais ça, plus jamais une guerre. Mais au contraire, on essaie de glorifier l’attitude de criminels de guerre ».

Mais, selon le procureur, « la situation serait encore pire s’il n’y avait pas eu le Tribunal. La poursuite pour les crimes commis est vraiment un point de départ pour donner une chance à la réconciliation ».

Cette question de la réconciliation se pose de la même façon à des milliers de kilomètres des Balkans notamment en République Démocratique du Congo. Dans une interview, Sandra Olsson, de l’ONG, Child soldiers international explique pourquoi les très nombreuses jeunes filles enrôlées de force ont des difficultés à quitter ces milices et à retrouver leurs communautés où elles se retrouvent stigmatisées. « Beaucoup de jeunes filles ne tentent même pas de s'échapper même s'il y a une opportunité car elles savent le rejet qui les attend chez elles. Et, les programmes de DDR (Désarmement, démobilisation et réinsertion, Ndlr) ne répondent pas suffisamment à cette problématique fondamentale de l’acceptation familiale et communautaire ».

Selon Sandra Olsson, « Ce e sont les communautés qui ont le pouvoir d'aider ces jeunes filles à se réintégrer. La jeune fille ne peut arriver à bon port que si sa famille et sa communauté lui accordent tout le soutien et le respect qui lui sont dus, lui permettant ainsi de surmonter souffrances et terreurs vécues dans la brousse, et de retrouver sa place parmi le siens ».

 

 

 

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