Syrie: l'UE veut relancer le processus politique après les frappes

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Les ministres des Affaires étrangères de l'UE, réunis lundi à Luxembourg, ont fait part de leur compréhension pour les frappes ciblées des Etats-Unis, de la France et du Royaume-Uni en Syrie et appelé à relancer le processus politique pour mettre fin au conflit.

"Le Conseil estime que les frappes aériennes ciblées ont constitué des mesures spécifiques prises dans le seul but d'empêcher le régime syrien d'utiliser à nouveau des armes chimiques et des substances chimiques comme armes pour tuer des Syriens", selon les conclusions de la réunion.

"Nous soulignons que l'élan de la situation actuelle doit être utilisé pour revigorer le processus visant à trouver une solution politique au conflit syrien", estiment les ministres. "L'Union européenne réaffirme qu'il ne saurait avoir de solution militaire", est-il souligné.

"Sans la Russie, il est impossible de résoudre ce conflit", a insisté le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas à son arrivée à Luxembourg. Et le mot d'ordre est d'éviter une "escalade" militaire dans la région, a insisté M. Maas.

-Dialoguer avec Moscou-

"Nous devons reprendre le chemin d'un dialogue politique sur la Syrie avec la Russie et l'Iran (les deux soutiens du régime syrien)", a renchéri son homologue belge Didier Reynders.

A La Haye, les ambassadeurs de Russie, du Royaume-Uni et de France se sont rendus lundi matin au siège de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) pour une réunion d'urgence consacrée à la Syrie, après l'attaque chimique présumée du 7 avril contre le fief rebelle de Douma qui a entraîné les frappes occidentales ciblées de samedi.

La priorité est de permettre à l'OIAC "d'achever le démantèlement du programme" chimique syrien, a insisté la France.

Pour le chef de la diplomatie du Luxembourg Jean Asselborn, les frappes occidentales de samedi sont "une opération unique et elle doit le demeurer".

"Une solution pacifique nécessite parfois une action robuste", a pour sa part justifié son homologue lituanien Linas Antanas Linkevicius.

"Le but de ces frappes a été de montrer qu'il y une ligne rouge qu'il ne faut pas dépasser", a expliqué Didier Reynders.

Tous les Etats membres en conviennent: l'utilisation d'armes chimiques -- dont est accusé le régime syrien -- à Douma est inacceptable et ne devait pas rester impunie.

La déclaration des 28 insiste sur la nécessité de faire "rendre des comptes" aux responsables de crimes de guerre. Mais elle ne justifie pas les frappes.

Les 28 sont divisés. A un bout de l'échiquier: la France et le Royaume-Uni. A l'autre: les neutres. Entre les deux: des membres de l'Otan, dont beaucoup sont partagés sur les frappes.

"La déclaration des 28 est le maximum qui pouvait être dit", a-t-on insisté de source diplomatique.

Nombre de gouvernements européens sont contrariés car ils craignent la réaction de Vladimir Poutine, soutien du président syrien Bachar al-Assad.

La veille des frappes, le président russe avait mis en garde contre tout acte "irréfléchi et dangereux en Syrie" qui pourrait avoir des "conséquences imprévisibles", lors d'un entretien avec le chef de l'Etat français Emmanuel Macron.

-'Rester unie'-

"Il faut que l'Union européenne reste unie. Il faut éviter que chaque pays puisse mener une politique autonome vis-à-vis de Moscou. C'est important pour que l'UE existe", avait plaidé un responsable européen sous couvert de l'anonymat.

Moscou tire avantage des divisions au sein de l'Union européenne. Les réactions après l'empoisonnement au Royaume-Uni de l'ancien agent double russe Sergueï Skripal -- attribué par Londres à la Russie -- l'ont démontré.

"Tout le monde a fait le même constat. Tout le monde a eu la même lecture des faits, mais tout le monde n'a pas répondu de la même façon", souligne une source diplomatique européenne.

Au total, 19 pays membres de l'UE ont expulsé des diplomates russes de leur territoire, cinq ont simplement rappelé leur ambassadeur pour consultations et trois n'ont pas bougé (Autriche, Chypre, Grèce). Et il aura fallu beaucoup de persuasion pour convaincre les 28 d'incriminer Moscou.

"Il faut espérer maintenant que la Russie comprenne qu'après la riposte militaire (...), nous devons joindre nos efforts pour promouvoir un processus politique en Syrie qui permette une sortie de crise. La France est disponible pour y parvenir", a affirmé dimanche le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian.