Quand Montebourg accuse Le Pen d'avoir fait "l'éloge de la Gestapo", il dit vrai (tribunal)

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Arnaud Montebourg ne peut être condamné pour avoir dit que Jean-Marie Le Pen a fait "l'éloge de la Gestapo". Tout simplement parce que c'est vrai, selon la justice: l'ancien président du Front national a perdu mardi son procès en diffamation contre l'ancien ministre socialiste.

Fait rarissime, les juges de la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, en charge des affaires de presse, ont en effet retenu "l'exception de vérité" soulevée par la défense.

Arnaud Montebourg a été relaxé car "il n'a fait que dire la vérité", s'est félicité son avocat, Me Christian Charrière-Bournazel, pour qui M. Le Pen s'est montré "bien imprudent" en engageant de telle poursuites.

Compte tenu de la "mauvaise foi" de Jean-Marie Le Pen, le tribunal l'a d'ailleurs condamné à verser 3.000 euros à l'ancien ministre du Redressement productif, pour procédure abusive.

Joint par l'AFP, M. Le Pen a expliqué qu'il va "bien évidemment" faire appel.

Le 23 février 2014, en pleine campagne pour les municipales, le ministre du Redressement productif avait débattu avec Marine Le Pen. "Moi je n'oublie pas que le président d'honneur du FN a fait il y a quelques années l'éloge de la Gestapo et de l'occupation allemande", avait-il alors déclaré.

Allusion, notamment, aux propos du cofondateur du parti d'extrême droite sur l'occupation allemande, qui n'aurait pas été "particulièrement inhumaine".

Propos qui lui ont valu, au terme d'une longue procédure, d'être définitivement condamné à trois mois de prison avec sursis et 10.000 euros d'amende, pour contestation de crime contre l'humanité.

Le jour de l'audience, le 16 février, Jean-Marie Le Pen n'avait pas pu venir: une perquisition dans son domaine de Montretout, à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) l'avait retenu.

Devant ses juges, Arnaud Montebourg, lui, avait souligné qu'il aurait même pu le qualifier de "falsificateur", eu égard à sa présentation du massacre d'Asq en 1944, où 86 Français ont été fusillés.

Dans son offre de preuve, la défense de l'ancien ministre a produit plusieurs décisions de justice, desquelles il ressort, selon le tribunal, que Jean-Marie Le Pen a bel et bien fait l'éloge de la Gestapo et de l'occupation allemande.

L'exception de vérité n'est que très rarement retenue par la justice, car la preuve doit être "parfaite, complète et corrélative aux diverses imputations formulées", selon une jurisprudence constante au moins depuis 1948.

Dans la quasi-totalité des cas, l'issue d'un procès en diffamation se joue non sur la véracité des propos litigieux, mais sur la "bonne foi" de celui qui les a tenus. C'est-à-dire que le tribunal s'attache à déterminer si le prévenu avait ou non suffisamment d'éléments pour tenir les propos poursuivis.

Mercredi dernier, Jean-Marie Le Pen, 87 ans, a été condamné par le même tribunal pour contestation de crime contre l'humanité à 30.000 euros d'amende pour avoir répété, il y a un an, que les chambres à gaz sont à ses yeux un "détail" de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale.

Le même jour, il a été condamné, à Nice cette fois, à 5.000 euros d'amende pour provocation à la haine envers les Roms, dont il avait notamment évoqué "la présence urticante" et "odorante".