Le sommet Europe-Asie endeuillé par l'attentat de Nice et hanté par la mer de Chine

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Le 11e sommet Europe-Asie (Asem), qui s'est ouvert vendredi à Oulan-Bator juste après l'attentat de Nice, a donné lieu à une farouche condamnation d'un terrorisme "haineux et lâche", tout en restant hanté par le regain de tensions sur la mer de Chine méridionale.

Cette réunion bisannuelle, qui rassemble une cinquantaine de pays, se veut un forum destiné à renforcer les coopérations économiques et politiques à travers le continent eurasiatique.

Mais l'actualité la plus immédiate a bouleversé l'agenda: la réunion s'est ouverte par une minute de silence en hommage aux victimes de l'attentat perpétré sur la Promenade des Anglais à Nice, faisant au moins 84 morts.

Les dirigeants présents ont exprimé "une solidarité spontanée et sincère", a indiqué à l'AFP le chef de la diplomatie française, Jean-Marc Ayrault.

"Tout le monde partage l'épreuve de la France", a poursuivi le ministre, qui a écourté son séjour en Mongolie après avoir appelé à intensifier les coopérations antiterroristes.

Dans un communiqué commun, les dirigeants des 51 pays asiatiques et européens membres de l'Asem ont condamné vendredi les récentes "attaques terroristes, haineuses et lâches" et réaffirmé leur "engagement à joindre (leurs) forces pour combattre la peste du terrorisme".

 

- 'Tant de rêves détruits' -

"C'est un tragique paradoxe de voir que l'attentat visait des personnes célébrant la liberté, l'égalité, la fraternité", a réagi le président du Conseil européen, Donald Tusk, pointant les trois valeurs de la république française.

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, très ému, a lui déploré "tant de rêves détruits, de plans de vie avortés, de biographies cassées...", tandis que le Premier ministre chinois Li Keqiang offrait de sobres "condoléances".

Mais la forte poussée de fièvre autour des différends territoriaux en mer de Chine méridionale était également dans tous les esprits.

La réunion mongole survient quelques jours après un arbitrage international désavouant de façon retentissante les prétentions de Pékin sur la quasi-totalité de cette mer stratégique.

La Cour permanente d'arbitrage de la Haye, saisie par les Philippines, a jugé que la Chine n'avait pas de "droits historiques" justifiant sa position ; cette victoire pour Manille est susceptible de concerner d'autres pays riverains aux revendications rivales: Vietnam, Malaisie, Brunei, ou l'Indonésie.

Tous étaient représentés à Oulan-Bator.

 

- 'Franc et direct' - 

Furieuse, la Chine avait martelé qu'elle ne tiendrait nullement compte de l'arbitrage. Manille, de son côté, souffle le chaud et le froid.

Après l'annonce jeudi de l'envoi d'un émissaire philippin en Chine "pour lancer des pourparlers" en signe d'apaisement, son ministre des Affaires étrangères, Perfecto Yasay, a rappelé vendredi en Mongolie que les Philippines "affirmaient résolument leur respect de cette décision marquante (de la Haye)".

Le simple fait d'aborder la question n'a pu manquer d'irriter Pékin, qui avait prévenu vertement que le sommet de l'Asem n'était pas "un lieu approprié" pour en discuter, et qui préférait y promouvoir les infrastructures de ses "nouvelles routes de la Soie".

Las: le Premier ministre nippon, Shinzo Abe, a confirmé que la question de la mer de Chine méridionale s'était bien invitée dans les discussions, aux côtés du terrorisme et du nucléaire nord-coréen.

Lors d'un rare entretien de 30 minutes avec son homologue chinois Li Keqiang, M. Abe a en outre appelé la Chine à respecter "l'ordre international basé sur le droit", selon les agences nippones. Et ce alors qu'une dispute territoriale oppose Pékin et Tokyo en mer de Chine orientale.

M. Li a rétorqué que le Japon, non impliqué en mer de Chine méridionale, devrait "faire preuve de retenue, cesser d'attiser les braises et d'interférer" sur le sujet, selon l'agence étatique Chine nouvelle.

Un simple "échange de vues franc et direct", relevait Yasuhisa Kawamura, porte-parole de la diplomatie japonaise.

"Des règles communes et prévisibles rendent les Etats plus sûrs", a abondé pour sa part Donald Tusk. Pour autant, sans se prononcer sur l'arbitrage, l'UE a seulement appelé vendredi Pékin et Manille à "résoudre de façon pacifique" leur différend.

Enfin, la réunion d'Oulan-Bator aura été l'occasion d'évoquer le Brexit -le vote britannique ayant suscité perplexité et alarme parmi les pays asiatiques.

"Il faut les rassurer! J'ai répété qu'on allait tout faire pour négocier dans les meilleures conditions possibles avec la Grande-Bretagne sa sortie de l'UE, mais qu'en même temps nous voulions conserver une Europe forte", a souligné Jean-Marc Ayrault.