Tunisie: des ONG vent debout contre un projet d'amnistie des faits de corruption

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"Ca ne passera pas": des ONG tunisiennes et internationales ont lancé vendredi une nouvelle initiative contre un projet de loi dit de "réconciliation" qui prévoit l'amnistie pour des faits de corruption en échange d'un dédommagement.

Proposé l'an dernier par le président Béji Caïd Essebsi, ce projet de loi prévoit l'amnistie de personnes, notamment des hommes d'affaires et des anciens du régime du président déchu Zine El Abidine Ben Ali, poursuivies pour corruption en échange d'un remboursement des sommes indûment gagnées et d'une pénalité financière.

Après une première vague de contestations l'été dernier, les critiques de la société civile ont refait surface, alors que le texte est à l'étude devant une commission du Parlement en vue de son adoption.

"Ce projet est dangereux, son adoption portera atteinte à l'image et à la réputation de la Tunisie", a clamé Omar Safraoui, président de la Coordination nationale indépendante de la justice transitionnelle, lors d'une conférence de presse de 24 représentants d'ONG. 

Selon lui, ce projet "ne sert pas l'intérêt général mais plutôt une classe déterminée et il marginalise les droits des victimes de la corruption". "Son adoption par le Parlement risque de faire entrer la Tunisie dans le chaos", a-t-il mis en garde.

D'après un communiqué du collectif, l'initiative "Ca ne passera pas" vise à "unir les rangs de la société civile contre l'impunité et à lutter contre toute tentative de porter préjudice au processus de justice transitionnelle (mis en place après la révolution de 2011, ndlr) et aux droits des victimes".

"Notre message est que l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a aujourd’hui une responsabilité historique. Elle peut mettre un terme au débat sur cette loi et éviter tout retour en arrière", a fait valoir Antonio Manganella, directeur du bureau d'Avocats sans frontières.

Ce texte, s'il est adopté, "permettra le retour sur scène des personnes symboles de corruption", a déploré Amna Guellali, responsable de Human Rights Watch (HRW).

Dans un communiqué publié la veille, l'ONG internationale a appelé à l'abandon du projet, craignant qu'il n'entraîne "une intensification de la corruption".

Lors de sa présentation, le président Essebsi a de son côté affirmé qu'il avait pour but "d'améliorer le climat de l'investissement", dans un pays exsangue économiquement.

Un appel à manifester ce vendredi soir à Tunis a été lancé sur les réseaux sociaux. L'an dernier, plusieurs rassemblements contre le projet de loi avaient eu lieu à Tunis par un mouvement citoyen nommé "Non, nous n'allons pas pardonner".