Timochenko, le guérillero colombien qui va signer la paix

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Le chef des Farc, Timochenko, qui doit signer lundi la paix avec le président colombien Juan Manuel Santos, est le guérillero d'origine paysanne qui va mettre un terme au plus vieux conflit armé d'Amérique latine.

Rodrigo Londoño, plus connu sous ses noms de guerre Timoleon Jimenez ou Timochenko, dirige les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes) depuis près de cinq ans et a supervisé les pourparlers de paix à La Havane, à partir de novembre 2012.

Lundi devant de nombreux chefs d'Etat et personnalités, les deux leaders tourneront la page de la guerre lors d'une cérémonie à Carthagène des Indes, sur la côte caraïbe (nord).

Le chef guérillero en a reçu le mandat lors de la Xe Conférence nationale de son mouvement, réuni ces derniers jours pour débattre de la conversion de la rébellion en parti politique légal.

"C'est l'homme qui va entrer dans l'Histoire pour avoir amené les Farc au processus de paix", juge Ariel Avila, analyste de la Fondation Paix et Réconciliation.

Selon ce spécialiste du conflit colombien, Timochenko est "l'un des plus aimés au sein des Farc" du fait de son étroite relation avec le défunt fondateur de la guérilla, Manuel Marulanda, alias Tirofijo.

Né le 22 janvier 1959 à Calarca, au coeur des plantations de café, et tout près du village natal de Tirofijo, Timochenko a été l'un de ses hommes de confiance. C'est lui qui, en mars 2008, annoncera publiquement sa mort, des suites d'un infarctus.

Mais ce n'est que le 4 novembre 2011, lorsque le successeur de Tirofijo, Alfonso Cano, est abattu par l'armée, que Timochenko prend les rênes de cette rébellion, issue d'une insurrection paysanne en 1964.

Ce stratège militaire, grand admirateur d'Hugo Chavez, devient alors à 52 ans le troisième leader des Farc et de ses 7.000 combattants, selon des chiffres officiels.

 - Carrière fulgurante -

 Formé à l'école du marxisme, Timochenko a milité au sein des Jeunesses communistes dans les années 1970 et étudié la médecine en Union soviétique puis à Cuba, mais sans être diplômé.

De retour en Colombie en 1979, il rejoint les Farc et en deux ans devient commandant de front. En 1982, âgé d'à peine 23 ans, il intègre l'état-major de la guérilla et trois ans plus tard son haut commandement qui ne compte que sept membres.

Début 2012, alors qu'il vient à peine de prendre la tête de la rébellion depuis quelques semaines, il écrit au président Santos pour proposer "une hypothétique table de discussions" afin de relancer le processus de paix après les échecs sous le gouvernement d'Andrés Pastrana, entre 1998 et 2002.

Quelques jours plus tard, il s'engage à mettre fin aux enlèvements de civils contre rançon, accédant à l'une des principales requêtes de M. Santos. Le chef de l'Etat - à l'origine de la pire offensive menée contre les Farc quand il était ministre de la Défense (2006-2009) - admet que la guérilla a fait un pas en avant.

Timochenko, homme corpulent de petite taille (1,65 m) au collier de barbe grisonnant, est sous le coup de diverses inculpations pour, entre autres, homicide aggravé, terrorisme, enlèvement avec rançon et rébellion. Il a déjà été condamné à un cumul de plus de 150 ans de prison par contumace.

Il vit clandestinement depuis des années dans les "montagnes de Colombie", d'où il a diffusé plusieurs communiqués à propos du processus de paix, sur le site web des Farc.

Et bien que les Etats-Unis offrent toujours une récompense de cinq millions de dollars pour toute information pouvant permettre son interpellation, Timochenko a pu se rendre à Cuba pour participer aux pourparlers de paix parce que la centaine de mandats d'arrêt lancés à son encontre ont été spécialement suspendus à cet effet.

Jusqu'à présent, Timochenko n'a pas demandé pardon pour les milliers de victimes des Farc mais a confié qu'il le ferait "au moment opportun". "Le passé ne doit jamais s'effacer, il doit toujours être présent pour qu'il ne se répète pas", avait-t-il déclaré à la chaîne Univision, lors d'une rare interview en mars.  

Après des décennies de lutte armée, il avait confié que sa plus grande leçon était qu'il "ne devait pas y avoir de guerre".