Yémen: violences en baisse à Hodeida, mais la paix reste lointaine

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Les combats à Hodeida, dans l'ouest du Yémen dévasté par cinq ans de conflit, ont diminué depuis un accord de cessez-le-feu dans cette ville stratégique conclu il y a tout juste un an sous l'égide de l'ONU, mais la paix reste lointaine.

Le gouvernement yéménite, appuyé par une coalition militaire dirigée par l'Arabie saoudite, et les rebelles Houthis, soutenus par l'Iran, ont convenu d'un cessez-le-feu le 13 décembre 2018 en Suède.

Cet accord porte notamment sur le contrôle par des forces neutres du port de Hodeida, point d'entrée principal des importations et de l'aide humanitaire internationale qui arrivent au Yémen.

Mais la région, qui s'étend du détroit de Bab al-Mandeb jusqu'à Hodeida sur la mer Rouge, ne connaît qu'un calme relatif depuis l'accord de 2018 et au sein de la population on craint une reprise des hostilités à tout moment.

"Les affrontements ont baissé mais ils n'ont pas complètement cessé", explique à l'AFP Rima Saleh, une résidente de Hodeida. "Un an après, l'accord n'a pas encore été mis en oeuvre et la situation relativement calme peut exploser d'un moment à l'autre", craint la jeune fonctionnaire de 33 ans.

Les rebelles Houthis se sont emparés en 2014 de pans entiers du Yémen dont la capitale Sanaa et Hodeida. Issus de l'importante minorité zaïdite concentrée dans le nord du pays, ils disent se soulever contre une marginalisation de la part de l'Etat central.

Les forces progouvernementales ont tenté de reprendre du terrain avec l'intervention depuis 2015 d'une coalition militaire dominée par l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis.

- Un quart des victimes -

Si les combats à Hodeida ont en grande partie cessé depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, "Hodeida a enregistré 799 victimes civiles depuis la signature de l'accord, le bilan le plus élevé du pays", où au moins 3.086 civiles ont péri depuis décembre 2018, ont déploré 15 organisations humanitaires.

"Un quart de toutes les victimes civiles au Yémen en 2019 ont été enregistrées dans le gouvernorat d'Hodeida", soulignent dans un communiqué commun les signataires, dont Oxfam, Action contre la Faim, Médecins du Monde ou le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC).

La guerre au Yémen a tué, selon diverses organisations humanitaires, des dizaines de milliers de personnes, essentiellement des civils, depuis l'intervention en 2015 de l'Arabie saoudite et ses alliés.

Environ 3,3 millions de personnes sont toujours déplacées et 24,1 millions, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d'assistance, selon l'ONU qui évoque régulièrement la pire crise humanitaire en cours dans le monde et dénonce les "crimes de guerre" commis par toutes les parties.

- "Peu de choses" -

A Hodeida, l'ONU a salué des avancées sur le terrain et notamment la mise en place en octobre de postes d'observation conjoints par les deux parties en conflit qui s'accusent par ailleurs de ne pas appliquer les termes de l'accord de 2018.

Mais "il n'y a toujours pas eu de retrait d'Hodeida, de cessez-le-feu durable, de libération de tous les prisonniers", a déclaré à l'AFP Ali Al-Sarari, conseiller du Premier ministre du Yémen.

En mai, l'ONU avait annoncé que les Houthis s'étaient retirés du port de Hodeida et de deux autres ports proches. Le gouvernement yéménite avait toutefois estimé qu'il ne s'agissait pas d'un véritable retrait", accusant les rebelles d'en remettre le contrôle à des garde-côtes qui leur sont favorables.

Les belligérants avaient par ailleurs convenu d'échanger 16.000 prisonniers dans le cadre de l'accord de 2018. Un an plus tard, la coalition a libéré à ce jour 135 combattants Houthis et les rebelles ont libéré 290 soldats.

"Très peu de choses de l'accord ont été mises en oeuvre, dont l'établissement de postes (conjoints)", a indiqué Hamid Assem, haut responsable des Houthis.

Mais, un haut responsable saoudien a fait état le mois dernier d'un "canal ouvert avec les Houthis depuis 2016" et le maintien des "contacts pour parvenir à la paix au Yémen".

A Hodeida cependant, on a du mal à croire à une fin prochaine du conflit.

Ainsi l'exprime Youssef Ali, un instituteur de 44 ans pour qui "la guerre va continuer, malgré les accords".