17.06.14 - RWANDA/JUSTICE - L’AVOCAT DE MUGESERA RÉCLAME DEUX ANS D’HONORAIRES IMPAYÉS

Kigali 17 juin 2014 (FH) - «A ce jour, je n’ai touché aucun sou (…) Nous ne pouvons pas organiser nos témoins de par le monde sans argent. Autant suspendre le procès ! ». Félix Rudakemwa, qui n’en peut plus, est avocat au barreau de Kigali. Il défend devant la Haute Cour du Rwanda l’universitaire Léon Mugesera extradé du Canada en janvier 2012 après une longue bataille judiciaire.

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Le plaideur rwandais menace de jeter l’éponge alors que la partie adverse est sur le point de boucler la présentation de ses moyens de preuve.Notamment poursuivi pour planification du génocide, génocide et incitation directe et publique à commettre le génocide, le linguiste rwandais répond essentiellement d’un célèbre discours en langue rwandaise prononcé en novembre 1992 lors d’un un meeting politique à Kabaya, dans l’ancienne préfecture de Gisenyi (nord-ouest).A l’époque du discours, Mugesera enseignait à l’Université nationale du Rwanda (UNR) et était vice-président, pour la préfecture de Gisenyi, du Mouvement républicain national pour la démocratie et le développement (MRND), le parti de l’ex-président Juvénal Habyarimana.Alors que le temps presse pour la préparation de la défense, Maître Rudakemwa se plaint, non seulement de n’avoir pas été payé depuis qu’il a pris en mains la défense de Mugesera, mais aussi de ne pas disposer des ressources financières et humaines nécessaires. « Nous avons des témoins en Afrique, en Europe, en Australie et ailleurs. Comment les rencontrer sans argent ? Le manque d’aide légale est un sérieux handicap. Nous l’avons souvent dit », déclare l’avocat, dans un entretien avec l’Agence Hirondelle.Dans une lettre à la Cour datée du 20 avril, l’avocat parle de «  l’impossibilité absolue d’accomplir sa mission » et met en cause le ministère de la Justice, l’accusant d’avoir failli à ses obligations dans le cadre de l’assistance aux accusés démunis. Une telle situation viole, selon le défenseur, le principe de l’égalité des armes entre les parties. « Face à ce problème crucial de manque d'assistance juridique qui persiste, la résolution serait de suspendre les procédures étant entendu que le conseil de défense se trouve présentement dans l'impossibilité absolue d'accomplir sa mission », indique la lettre. De son côté, le ministère de la Justice affirme n’avoir reçu aucune demande d’aide juridictionnelle de la part de Mugesera. « Le principe est que chacun doit pourvoir au coût de son  procès. Mais si un indigent en fait la demande, cela est examiné. Cependant, je ne suis au courant d’aucune demande de la part de Mugesera », indique le ministre Johnston Busingye.Pourtant, l’avocat affirme avoir adressé plusieurs lettres au ministère pour le compte de Mugesera.Au de la procédure, Mugesera était assisté de Donat Mutunzi, un autre avocat du barreau de Kigali qui était payé par la famille de l’accusé. Mais suite au cumul d’honoraires impayés, Maître Mutunzi s’est retiré, affirmant qu’il « ne pouvait continuer à travailler pour rien ». Ainsi, souligne le procureur, Mugesera n’avait pas fait valoir d’indigence dès le départ.Entre - temps, le procès se poursuit.SRE-ER