07.03.08 - RWANDA/GACACA - UNE CONDAMNATION CONFIRMEE EN REVISION A NDAMIRA

NGOMA (Est du Rwanda) 7 mars 2008 (FH) - Festus Sekamana , 44 ans, dont l’acquittement en appel était en révision, a de nouveau été condamné à l’emprisonnement à vie par la juridiction Gacaca de Ndamira, district de Ngoma, a constaté sur place l’Agence Hirondelle. Selon Jean Claude Furaha, un responsable des gacacas, une deuxième demande de révision auprès la juridiction d’appel de Kibungo aurait été faite.

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« Nous avons eu vent de ses manœuvres », a-t-il dit à l’agence en rappelant que cette juridiction «l’avait déjà acquitté en appel dans un procès contesté».

Plaidant non coupable, Sekamana a été reconnu coupable et condamné pour crimes contre l’humanité et l’assassinats de Mugarura et de sa famille, de Gakwaya Michel, d’André Bushayija, assistant médical, de Thérèse Batamuriza et de ses 5 enfants ainsi que de Claver Kayinamura.

Appréhendé le 17 février 1996 et détenu depuis à la prison de Kibungo, Sekamana avait comparu une première fois devant la juridiction Gacaca de Kibungo, a expliqué à l’agence Hirondelle le président de cette juridiction. En raison de charges accablantes étayées par des témoins, l’accusé avait alors été reconnu coupable et condamné à la réclusion à perpétuité et à la dégradation civique.

« C’est dans la juridiction d’appel de Kibungo, le 2 octobre 2007, que les irrégularités commencent", a expliqué Furaha à Hirondelle. Selon lui aucun témoin à charge n’est venu témoigner. Un seul témoin est venu pour la défense, Paul Sinzinkayo qui se faisait appeler Paul Izabiliza du nom d’un témoin à charge. « Faute de charges, c’est l’acquittement espéré », a expliqué le parajuriste d’Ibuka.

Peu après, le président de la juridiction a signé sa libération et Sekamana est sorti le même jour, raconte-t-il. Mais cela a suscité de vives réactions. Les témoins et victimes se sont indignés. Les responsables de Gacaca ont fait pression. La même juridiction, sans avoir siégé, émet alors un mandat d’arrêt et remet en détention Sekamana. L’affaire a alors été envoyée en révision devant la juridiction d’appel du secteur Ndamira, confirme un juge inyangamugayo (juge « intègre » élu sur leur réputation par la communauté NDLR) de cette juridiction.

Là, les témoignages auraient été trop accablants. Outre les précedents témoins, quatre anciennes victimes de Sekamana sont venues. L’un d’entre eux, Jean Claude Uwera aurait dit avant de s’évanouir : «Ainsi cet animal est toujours là ! je le revois encore, sa longue épée dégoulinant de sang à la main !», à précisé à l’agence un témoin de la scène.

Plaidant toujours non coupable, mais reconnu coupable de tous les chefs d’accusation, Sekamana a de nouveau été condamné à la prison à vie et à la dégradation civique, Selon Furaha «ce procès a été juste et équitable » malgré des erreurs ou des irrégularités antérieures.

«Je n’ai pas tué ces Tutsi comme on m’en accuse, mais je les ai seulement enterrés» a tenté de faire valoir auprés d’Ibuka Sekamana alors qu’il se trouvait le 16 février dernier dans sa prison de Kibungo.

Selon une autorité locale, la juridiction d’appel de Kibungo serait coutumière de ce genre d’acquittement, comme celui de Philippe Habarurema qui avait été auparavant condamné à 30 ans d’emprisonnement pour avoir tué Agathe, fille de Karwana, après l’avoir amputé d’un sein.

A propos de ces irrégularités, plusieurs personnes contactées parlent de corruption. «On en parle beaucoup au niveau de la juridiction d’appel de Kibungo. Mais les preuves ?», a expliqué à l’agence Hirondelle un policier local.

SRE/PB/GF