Colloque à Genève : la justice transitionelle à l'épreuve du terrain

Colloque à Genève : la justice transitionelle à l'épreuve du terrain©ONU/UN
Le Palais des Nations à Genève
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Une table ronde s’est tenue au Palais des Nations le 10 octobre sur « repenser et clarifier les enjeux de la Justice transitionnelle au XXIème siècle. », avec comme idée, confronter les expériences en ce domaine afin de permettre un vrai débat sur les améliorations possibles des processus de transition.

Organisée conjointement par la représentation permanente suisse à l’ONU à Genève, le Ministère des Affaires étrangères français et l’Institut des Hautes Etudes sur la Justice (IHEJ). L’IHEJ − partenaire de JusticeInfo − est un organisme d’étude et de conseil sur les évolutions du droit et de la justice.

L'approche du colloque se voulait concrète avec la présence d'intervenants et acteurs impliqués dans un processus de justice transitionnelle.

Ainsi, Farah Hached présidente de l’association tunisienne le « Labo démocratique » a évoqué les difficultés rencontrées par l’Instance Vérité et Dignité (IVD), notamment concernant le projet de loi sur la réconciliation économique qui amnistierait certains délits liés à la corruption, ou encore son mandat très large. Elle a souligné aussi l’absence de cadre juridique sur les archives de la dictature, l’IVD y a difficilement accès.

C’est aussi un membre de la société civile, Bassma Kodmani, directrice de l’Initiative Arab Reform, qui est venue dresser un bilan pessimiste mais réaliste de l’absence prévisible de justice en Syrie, le contexte actuel pouvant faire craindre l’impunité des officiers de haut rang jouant un rôle dans la commission des crimes de guerre. Bassma Kodmani regrette que la composante « justice » soit absente de la plupart des négociations de paix, alors même que « les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en Syrie sont parmi les plus documentés. » En bref, la poursuite de ces crimes est l’enjeu crucial d’une future justice transitionnelle en Syrie.

Mô Bleeker, envoyé spécial de la Suisse pour le traitement du passé et la prévention des atrocités, a fait état de son expérience sur de nombreux terrains, et en particulier aux Philippines. Elle a tenté de proposer une méthodologie en soulignant l'importance de construire les processus avec en amont un diagnostic général pour déterminer le type de mesures le plus significatives. L’objectif est de sortir des concepts et grilles préfabriqués de la justice transitionnelle, car chaque processus est unique à un pays donné. Selon elle, pour s’inscrire dans la durée, il est nécessaire de définir avec les acteurs locaux quatre ou cinq problématiques clés à traiter en visant le court/moyen et long terme plutôt que de réfléchir uniquement en termes de « transition ».

Enfin, Vincent Larrouzé, chef de la Mission de la gouvernance démocratique du Ministère français des affaires étrangères et du développement international, a insisté sur le « volontarisme » français avec pour objectif de « faire le deuil des crimes de masse. »

Les intervenants ont parfois dressé un bilan mitigé des expériences, mais tous s’accordent à dire que les défis existants ne sont pas des raisons de décourager les processus de justice transitionnelle.