La "Herceg-Bosna", sanglante tentative séparatiste des Croates de Bosnie

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Les dirigeants de la "République croate d'Herceg-Bosna", entité unilatéralement proclamée, furent un élément moteur de la guerre entre Croates catholiques et Bosniaques musulmans (1993-94).

Ils doivent entendre mercredi leur verdict en appel par la justice internationale

Dans quel contexte est née cette entité ?

Depuis le début de la guerre de Bosnie en 1992, les Croates catholiques de Bosnie combattent auprès des Bosniaques musulmans, contre les Serbes orthodoxes.

Mais les leaders nationalistes de la communauté croate (17% des 4,4 millions d'habitants), dissimulent de moins en moins leur volonté d'intégrer une "Grande Croatie". Ce projet, soutenu à Zagreb par le président croate Franjo Tudjman, tend la situation avec les Bosniaques.

En mai 1992, Radovan Karadzic, leader serbe de Bosnie, et le chef nationaliste croate Mate Boban, concluent un accord qui ressemble fort à un partage de la Bosnie aux dépens des Bosniaques.

Les affrontements croato-bosniaques sporadiques se multiplient pour aboutir à un conflit ouvert en 1993. En août, Boban proclame officiellement la "République croate d'Herceg-Bosna", dotée d'un "parlement", d'une "armée". Elle adopte la monnaie croate.

La bataille de Mostar

La destruction par les Croates du "Stari Most" de Mostar, pont ottoman du XVIème siècle, reste l'image marquante de cette "guerre dans la guerre" de Bosnie.

Mostar était un des symboles de la Bosnie multi-ethnique. Pendant le conflit, les Croates tiennent l'ouest, les Bosniaques l'est. Dans ces quartiers orientaux, 80% des bâtiments sont détruits.

Le 9 mai 1993, de violents combats d'artillerie éclatent. Visé pendant neuf mois de bataille, le "Stari Most" s'effondre le 9 novembre dans les eaux de la Neretva, après avoir été une ultime fois ciblé. Il est reconstruit à l'identique après la guerre avec le soutien de l'Unesco et de la Croatie.

Les accords de Washinton en mars 1994 mettent fin à cette guerre. Ils fondent une fédération croato-musulmane.

Que reproche-t-on aux leaders de la "Herceg-Bosna" ?

Il leur est reproché d'avoir systématiquement entrepris de chasser les Bosniaques des zones que leurs forces contrôlaient, usant dans cette épuration ethnique, de massacres, de viols, du blocage de l'aide humanitaire, et instaurant des conditions inhumaines dans des centres de détention.

Boban est mort en 1997. Son "Premier ministre" Jadranko Prlic a été condamné en 2013 à 25 ans de prison. Cinq autres responsables ont été condamnés, dont le "ministre de la Défense", Bruno Stojic, et l'homme dont le nom reste attaché à la destruction du pont de Mostar, Slobodan Praljak.

Quel héritage pour la "Herceg-Bosna"

Sous pression occidentale, le président croate Franjo Tudjman accepte en août 1996 la dissolution de cette "République". Mais parmi les Croates de Bosnie, la nostalgie perdure. En mars 2001, est proclamée une "autonomie temporaire croate" étouffée dans l'oeuf quand la communauté internationale obtient le départ du membre croate de la présidence tripartite bosnienne, Ante Jelavic.

Après la récente proclamation d'indépendance en Catalogne, des graffitis annonçant que la "Herceg-Bosna" serait la suivante ont fleuri à Mostar.

Aujourd'hui, à l'unisson de l'actuel membre croate de la présidence bosniennen Dragan Covic, une partie des quelque 540.000 Croates de Bosnie (15% de la population) réclame une entité propre, au même titre que les Serbes. Si l'Herceg-Bosna "n'avait pas existé, difficile d'imaginer qu'il resterait un peuple croate" en Bosnie, a récemment dit Dragan Covic.

D'où vient ce nom d'"Herceg-Bosna" ?

Le terme "Herceg" fait référence à Stjepan Vukcic Kosaca, Herceg (ou Herzog, duc) d'Herzégovine au XVème siècle, que les Croates considèrent comme leur.