La semaine de la justice transitionnelle : le Mali à la peine, la Tunisie aussi

La semaine de la justice transitionnelle : le Mali à la peine, la Tunisie aussi©
Célébration de l'accord de paix au Mali en 2015
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Dans le large domaine de la « justice transitionnelle », les processus de réconciliation sont la clef obvie de la transition. Le Mali le montre une nouvelle fois à ses dépens, comme l’explique le correspondant de JusticeInfo.net à Bamako, Bokar Sangaré.

Faute d’application de l’accord de 2015 dit d’Alger censé réconcilier le nord et le sud du pays et ses communautés, la situation se dégrade dangereusement. Et met en alerte acteurs maliens ainsi que la communauté internationale en cette année 2018 où le pays doit organiser une élection présidentielle dans une situation sécuritaire de plus en plus précaire sur l’ensemble du territoire. Cité par JusticeInfo.net, Ilad Ag Mohamed, porte-parole de la Coordination des mouvements de l’Azawad avoue : « Plus on met du temps à mettre en œuvre les dispositions sécuritaires de l’Accord, plus la situation va se dégrader et moins on aura de chance de sauver le reste ».  La présidentielle, gage théorique d’une transition bien ordonnée, est incertaine, même si le gouvernement se défend de tout report. Refusant de prétexter, « l’exception de sécurité », exposée dans nos pages par l’universitaire et juriste Didier Niewiadowski. Un ancien premier ministre Moussa  Mara, explique : « L’insécurité crée des incertitudes sur les échéances électorales même si des élections imparfaites valent mieux que l’absence d’élections ». À ces violences politiques, islamistes mais pas seulement, se nouent un climat de violences criminelles entretenues par des bandes armées de multiple obédience. « Dans des régions en très grande difficulté économique, la tentation est grande pour certains de recourir à des méthodes brutales contre les populations afin de subvenir à leurs besoins », écrivait ainsi, Ibrahim Maïga, chercheur à l’Institut d’études de sécurité.

 

Violences

Ces liens entre violences politiques et criminelles sont analysés par notre conseiller éditorial Pierre Hazan qui explique que « le continuum entre violence politique et criminelle est insuffisamment exploré, comme si une société devenait subitement différente dès lors que la paix a été signée ». « Pourtant, une société brutalisée et traumatisée par des années de conflit porte en elle les séquelles de la violence pour longtemps », ajoute-t-il.
En Tunisie aussi, rien n’est gagné, selon Amna Guellali. La directrice de Human Rights Watch à Tunis explique ainsi : « Pendant ces sept années (NDLR depuis la Révolution)  il n’y a pas eu de réforme en profondeur de l’appareil sécuritaire. On relève surtout la prévalence d’un état d’impunité généralisée qui ne peut que mener à la poursuite  des mêmes pratiques. L’impunité, on le sait, alimente les violations ».
Dans un autre pays, le Népal, les défenseurs des droits de l’homme déçus par les atermoiements de la justice transitionnelle ne disent pas autre chose : « si les commissions Justice et Vérité échouent à répondre aux demandes des victimes en termes de justice et vérité, les gens ne croiront plus à ces mécanismes et poseront de bonnes questions sur la crédibilité de la justice ».