En Centrafrique, condamnation unanime d’un communiqué appelant à la violence

Echaudés par des années de conflit intercommunutaire, les Centrafricains unissent leurs voix pour dénoncer un texte incitant les chrétiens à venger la mort de prêtres et fidèles tués ces derniers jours dans le pays.

En Centrafrique, condamnation unanime d’un communiqué appelant à la violence©Capture d'écran du site de Radio Ndeke Luka
Cathédrale de l'Immaculée Conception à Bangui
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Depuis le début de la semaine, circule sur internet un communiqué signé d’un mouvement se présentant, selon Radio Ndeke Luka, comme le défenseur de la communauté chrétienne, qui a eu à déplorer au cours des derniers mois, la perte de fidèles et de responsables ecclésiastiques tués, lors de violences intercommunautaires. Dans son communiqué, cette « Ligue de défense de l’Eglise », jusqu’alors inconnue en Centrafrique, « prétend dénoncer l'immobilisme des autorités nationales et des responsables de l'Eglise catholique face aux violences à l'endroit des prêtres, religieux, pasteurs », rapporte Radio Ndeke Luka, sur son site internet. Faisant état d’assassinats perpétrés « au vu et au su de tout le monde », le mouvement appelle les Chrétiens à la vengeance.

Niant tout lien avec cette « ligue », la Conférence des Evêques catholiques de Centrafrique (CECA) exhorte les fidèles à ignorer cet appel. « Les Evêques de Centrafrique ont été indignés par ce communiqué issu d'une organisation dénommée "la ligue de défense de l'église" en Centrafrique. Dans ce communiqué, les projets que cette ligue prétend réaliser sont contraires à l'évangile, aux aspirations de l'église et à  son engagement ici en Centrafrique", écrit le secrétaire général de la CECA, le Père Joseph Tanga Koti, cité par Radio Ndeke Luka. « Les Evêques de Centrafrique voudraient que les Centrafricains soient très vigilants. Il y a toujours les ennemis de la paix qui voudraient créer un conflit entre les chrétiens et les musulmans pour conclure qu'en Centrafrique chrétiens et musulmans ne peuvent plus vivre ensemble », ajoute le porte-parole de la CECA. 

Cet appel à la vengeance a par ailleurs été condamné par ), la Coordination des organisations musulmanes de Centrafrique (COMUC), la Ligue centrafricaine des droits de l'homme, le Haut Conseil de la Communication et l’Association des blogueurs centrafricains.

Indignation également de la part de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA). Lors d’une conférence de presse mercredi à Bangui, la capitale centrafricaine, le porte-parole de la MINUSCA, Vladimir Monteiro, a « lancé un appel à toute la population centrafricaine pour qu’elle résiste à toute forme de manipulation qui pourrait entraîner de nouvelles violences ».

 « Tout en soulignant sa forte condamnation des crimes odieux commis contre des membres du clergé catholique notamment, la MINUSCA rappelle que de tels discours enfreignent des dispositions aussi bien internationales que nationales qui encadrent l’exercice de la liberté d’expression et de la presse », a poursuivi Monteiro.

Le porte-parole a salué la condamnation dudit communiqué par le Haut Conseil de Communication (HCC) et a réitéré l’engagement de la MINUSCA à poursuivre son action avec les autorités gouvernementales et d’autres entités centrafricaines pour faire cesser toute propagation de discours pouvant fragiliser le vivre ensemble, selon un communiqué de cette mission de l’ONU.

La Centrafrique traverse depuis cinq ans la crise la plus profonde de son histoire depuis son indépendance de la France en 1960. En mars 2013, la Séléka, une coalition rebelle majoritairement musulmane, a chassé du pouvoir le président François Bozizé. Impliqués dans de nombreuses exactions contre la population civile, ls rebelles de cette nébuleuse ont dû faire face aux Antibalaka, des milices d’auto-défense majoritairement chrétiennes qui, à leur tour, se sont livrées à des violences.