La semaine de la justice transitionnelle : amnistie en Côte d’Ivoire et au Soudan du Sud

La semaine de la justice transitionnelle : amnistie en Côte d’Ivoire et au Soudan du Sud©@AFP
Simone Ggagbo (au milieu, souriante) arrive à son domicile à Abidjan le 8 août 2018 après sa libération
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Deux chefs d’Etat africains ont amnistié des opposants au cours de la semaine qui s’achève.

En Côte d’Ivoire, la décision a été annoncée le lundi 6 août par le président Alassane Ouattara en personne, dans un discours à l’occasion du 58è anniversaire de l’indépendance de cette ancienne colonie française.

Parmi les 800 bénéficiaires, figure l’ancienne Première dame, Simone Gbagbo, dont le mari, Laurent, est actuellement jugé à la Cour pénale internationale (CPI), à La Haye, aux Pays-Bas. Incarcérée après la sanglante crise post-électorale qui avait fait 3.000 morts en 2010-2011 et la défaite militaire de son camp face à celui de l'actuel président, Simone Gbagbo avait été condamnée en 2015 à 20 ans de prison pour « atteinte à la sûreté de l'Etat ». Deux jours après l’annonce de l’amnistie, elle est sortie de prison, toute souriante, quoique visiblement marquée par ces années de détention. A sa résidence, dans un quartier huppé d’Abidjan, cette chrétienne évangélique réputée très pratiquante été accueillie par une foule de partisans en liesse.

Si la décision du président Ouattara a été saluée par l’ensemble de la classe politique ivoirienne comme un geste en faveur de la réconciliation nationale, les victimes de la crise de 2010-2011 y voient, pour leur part, une sorte de sacre de l’impunité. Reste que Simone Gbagbo est toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt de la CPI, que le gouvernement ivoirien refuse d’exécuter.

Amnistie également au Soudan du Sud, plongé depuis cinq ans une guerre civile sur fond de rivalité politico-ethnique entre le président Salva Kiir et son ancien numéro deux Riek Machar. Dans un décret daté du jeudi 8 août, Salva Kiir a amnistié son principal adversaire et d’autres rebelles, une décision qui intervient moins d’une semaine après la signature au Soudan d'un accord de partage du pouvoir entre le gouvernement et la rébellion. Cet accord doit notamment permettre à Riek Machar de retrouver son poste de vice-président. La guerre a éclaté au Soudan du Sud fin 2013, quand Salva Kiir a accusé Riek Machar de fomenter un coup d’État. Le conflit a déjà fait des dizaines de milliers de morts et des millions de déplacés.

En République démocratique du Congo (RDC), un pays qui n’a jamais connu de passation pacifique de pouvoir depuis son indépendance de la Belgique en 1960, vingt-trois candidats ont déposé leurs dossiers pour succéder au président Joseph Kabila. Parmi eux, figure Emmanuel Ramazani Shadary choisi le jeudi 8 août, au dernier jour du dépôt de candidature, comme porte-drapeau de la majorité présidentielle. Kabila a désigné son « dauphin » après avoir été longtemps soupçonné par l’opinion nationale et internationale de vouloir briguer un troisième mandat en violation de la constitution. Parmi les principaux adversaires du camp présidentiel, se trouve l'ancien vice-président et ex-chef de guerre Jean-Pierre Bemba acquitté par la Cour pénale internationale (CPI) le 8 juin. Bemba attend encore le verdict de la CPI dans une affaire annexe.

La Centrafrique est un autre pays africain en quête de paix, de justice et de réconciliation. A ce sujet, le Français Didier Niewiadowski, juriste et ancien diplomate, analyse les possibles implications de la présence de soldats et de sociétés russes jouxtant, dans le pays, la mission militaire de l’Union européenne et la force des Nations unies. « Si le discours des officiels russes est bien de rétablir l'autorité de l'État et de renforcer les capacités des FACA (Forces armées centrafricaines), en revanche sur le terrain, les employés des sociétés privées russes pactisent souvent avec des chefs rebelles », affirme cet ancien diplomate qui fut notamment en poste à Bangui (2008-2012). « L'irruption de la Russie sur la scène centrafricaine complique la tâche de l'Union africaine et de l'ONU et met à mal la coordination des différentes actions, notamment au sein du G5 (ONU, Union africaine, Union européenne, Etats-Unis, France) », ajoute-t-il.