Burundi : pas de sanctions dans la nouvelle résolution de l'ONU

Burundi : pas de sanctions dans la nouvelle résolution de l'ONU©Désiré Nimubona/IRIN
Manifestation à Bujumbura contre un troisième mandat du président Nkurunziza
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Les alertes qui s'étaient multipliées ces derniers jours au sujet de la situation au Burundi laissaient présager une réaction ferme de la part du Conseil de sécurité des Nations unies.

Certains membres permanents du Conseil avaient souligné que le climat actuel au Burundi rappelait celui qui avait prévalu au Rwanda voisin à la veille du génocide des Tutsis de 1994.

La France, dans un projet de résolution plus ou moins musclé, avait ainsi suggéré des sanctions ciblées contre les responsables des violences au Burundi.

C'est également ce qu'avaient demandé des observateurs indépendants comme la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH). « La gravité de la situation requiert une action d'urgence et coordonnée de la communauté internationale. Les condamnations des exactions et des incitations à la violence sont importantes mais il importe désormais de passer aux actes : il faut activer les sanctions », avait recommandé le vice-président de la FIDH, Dismas Kitenge, dans un entretien avec JusticeInfo.Net.

 

 Une résolution votée en moins d'une minute

 

Après trois jours de discussions, c'est un texte a minima qui a été adopté jeudi par le Conseil de sécurité. Une résolution votée à l'unanimité et en moins d'une minute, parce que ne prévoyant plus ces sanctions qui n'étaient pas du goût de la Russie et des membres africains du Conseil de sécurité. 

Selon les termes de cette nouvelle résolution qui porte le numéro 2248, le Conseil de sécurité engage le gouvernement burundais et toutes les parties à rejeter toute forme de violence et à s'abstenir de « tout acte qui mettrait en péril la paix et la stabilité dans le pays ». Le Conseil exhorte les autorités de Bujumbura « à garantir le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous », conformément à leurs obligations internationales. 

Condamnant fermement les violations des droits de l'homme perpétrées tant par les forces de sécurité que par les milices, les membres du Conseil de sécurité exhortent le gouvernement à adhérer à l'état de droit, « à faire preuve de transparence pour ce qui est d'amener les responsables à répondre des actes de violence » et à coopérer pleinement avec le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme.

Bujumbura doit également coopérer avec la médiation, menée par la Communauté d'Afrique de l'Est  (EAC) sous l'égide de l'Union africaine, en vue d'organiser « immédiatement » un dialogue interburundais véritable, associant toutes les parties, aussi bien dans le pays qu'à l'étranger, « afin de trouver une solution consensuelle, propre au Burundi».

 

 Pour un dialogue sans exclusive

 

 Le Conseil de sécurité déclare, en outre, son intention d'envisager des mesures supplémentaires à l'encontre de tous les acteurs burundais qui, par leurs actes ou leurs propos, concourent à perpétuer la violence et entravent la recherche d'une solution pacifique.

Dans le préambule de la présente résolution, le Conseil note la décision de l'Union africaine d'imposer des sanctions contre de tels acteurs et rappelle que le Burundi, État partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), s'est engagé à lutter contre l'impunité des crimes relevant de la compétence de la Cour. 

Enfin, les membres du Conseil se félicitent de la décision du secrétaire général de désigner un Conseiller spécial pour la prévention des conflits, qui coordonnera l'action de l'ONU et œuvrera avec le gouvernement du Burundi et les parties concernées en vue de promouvoir un dialogue interburundais sans exclusive et un règlement pacifique du conflit.

Le secrétaire général devrait, dans les 15 prochains jours, présenter au Conseil « des options sur la présence future de l'ONU au Burundi ».

Selon des sources au département des opérations de maintien de la paix de l'ONU, il serait envisagé de déployer au Burundi un contingent la pléthorique force onusienne actuellement déployée en République démocratique du Congo (RDC) voisine. Mais cela nécessiterait l'accord préalable des autorités burundaises ou alors l'adoption d'une résolution contraignante du Conseil de sécurité, ce qui semble peu probable pour le moment.

 

« Nous ne pourrons pas prétendre que nous ne savions pas »

 

A l'ouverture des débats sur le Burundi, lundi, le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, avait tenu à alerter les membres du Conseil sur le risque d'escalade dans le pays. « Je pense que les Etats membres, et ce Conseil, peuvent intervenir pour empêcher la répétition des horreurs du passé », a dit M. Zeid, soulignant le nombre croissant d'exécutions extrajudiciaires au cours des derniers mois, les allégations crédibles de l'usage de la torture et les centaines de milliers de déplacés et de réfugiés fuyant la violence.

Pour sa part, le conseiller spécial du secrétaire général de l'ONU pour la prévention du génocide, Adama Dieng, avait averti : « Etant donné que nous disposons d'informations claires sur la gravité de la situation, nous ne pourrons pas prétendre, si une situation de conflit total éclate, que nous ne savions pas. La Communauté internationale a la responsabilité de protéger les Burundais et de prévenir des atrocités ».