La très prudente visite de la CPI en Israël

La très prudente visite  de la CPI en Israël©MOHAMMED ABED / AFP
Palestiniens travaillant sur les décombres de leurs maisons, détruites durant la guerre de 50 jours entre Israël et les militants du Hamas qui eu lieu en été 2014.
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Une délégation du bureau du procureur de la Cour pénale internationale (CPI) s’est rendue à Tel Aviv, Jérusalem et Ramallah du 5 au 10 octobre. Une première visite de la Cour depuis l’ouverture d’un examen préliminaire, il y a 22 mois, sur les crimes commis depuis le 13 juin 2014 en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.

 C’est sur la pointe des pieds qu’une délégation du bureau du procureur de la Cour pénale internationale s’est rendue en Israël et en Cisjordanie, du 5 au 10 octobre 2016. Israël dénie toujours à la Cour toute autorité dans le conflit, mais a décidé, voilà plus d’un an, d’assouplir quelque peu sa position et de permettre cette première visite. Dans un conflit où chaque geste a valeur de symbole politique, bien des précautions semblent avoir entouré ce premier contact. Ni la procureure générale, Fatou Bensouda, ni son adjoint, James Stewart, n’ont fait le déplacement. La visite avait été annoncée mi-septembre par le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou. N’ayant pas ratifié le traité de la Cour dit traité de Rome, Israël n’est pas tenue de coopérer.

Une visite éducative

La veille du départ, la procureure annonçait la visite par un communiqué de presse. Si la Cour se rend à Tel Aviv, Jérusalem et Ramallah, ce n’est pas pour « collecter des preuves » , précisait le communiqué. Il n’y aurait donc pas de visites des sites de crimes, mais un travail d’éducation, visant à « une meilleure compréhension du travail de la Cour » pour la prémunir de « toute tentative de politisation » du dossier en cours.  Ouvert en janvier 2015 à la demande de l’autorité palestinienne à Ramallah, ce dossier porte sur les crimes présumés commis en Cisjordanie et à Jérusalem-Est depuis le 13 juin 2014. La veille, trois adolescents israéliens étaient kidnappés puis tués, et Israël lançait une série de perquisitions et d’arrestations. Puis le 7 juillet, les Forces de défense israéliennes (FDI) lançaient l’opération Bordure Protectrice, sur Gaza. Elle prendra fin le 26 août, faisant 1462 civils morts et plus de 11 000 blessés côté palestiniens, selon le Haut-commissariat aux droits de l’homme de l’Onu, et six civils tués côté israéliens auquel s’ajoutent plus de 1600 blessés. Mais la délégation de la CPI ne s’est pas rendue à Gaza, suscitant les critiques du Hamas, qui dans un communiqué a reproché à la Cour d’avoir « cédé aux exigences de l’occupation israélienne d’exclure la bande de Gaza de l’agenda de la délégation » , et affirmé que « la visite a causé plus de souffrances pour les familles des victimes qui comptent sur la CPI pour leur rendre justice et conduire les tueurs israéliens devant la Cour » . Le Hamas a toujours été considéré comme une cible potentielle de la Cour, et le président Mahmoud Abbas avait dû obtenir son aval avant de se tourner vers la juridiction.

La complémentarité en question

La CPI n’en est pour l’heure qu’à l’examen préliminaire, au terme duquel l’accusation devra décider d’ouvrir, ou non une enquête. La procureure demande « l’espace et le temps nécessaire »  pour conduire le dossier. « Il ne manque pas de preuves et nous pensons que le bureau du procureur aurait pu bouger plus rapidement », regrettait néanmoins Ammar Hijazi, un responsable du ministère des Affaires étrangères de l’autorité palestinienne. Dans un rapport d’étape de novembre 2015, Fatou Bensouda établissait que des crimes ont été commis tant côté israélien que palestinien. Pour décider de l’ouverture d’une enquête, la procureure doit encore déterminer si les justices israéliennes et palestiniennes ont les moyens et la volonté de conduire des procès. Aucune enquête n’a été ouverte du côté du Hamas. Et fin août, le procureur militaire israélien concluait son enquête sur les crimes commis par les Forces de défense israélienne à Gaza, renvoyant en procès trois soldats israéliens pour des faits de pillage. Pour le reste, il concluait que les victimes n’étaient pas des civils mais des combattants du Hamas, accusé d’avoir utilisé la population comme bouclier humain et d’avoir transformé en base militaire des infrastructures civiles. Le bombardement de sept sites des Nations unies, dont cinq écoles, avaient suscité de nombreuses protestations, mais aucune poursuite n’a été engagée pour ces faits.

 

Communiqué CPI visite : 

https://www.icc-cpi.int//Pages/item.aspx?name=161005-OTP-stat-Palestine

Document de novembre 2015 sur examens préliminaires dont Palestine:

https://www.icc-cpi.int/iccdocs/otp/OTP-PE-rep-2015-Fra.pdf

Communiqué du Hamas:

http://www.qassam.ps/news-10978-Hamas_ICC_visit_useless_after_excluding_Gaza.html

(Le communiqué en arabe sur le site du Hamas : http://hamas.ps/ar/post/6226/%D8%AD%D9%85%D8%A7%D8%B3-%D9%86%D8%A3%D8%B3%D9%81-%D9%84%D8%A7%D8%B3%D8%AA%D8%B3%D9%84%D8%A7%D9%85-%D9%88%D9%81%D8%AF-%D8%A7%D9%84%D9%85%D8%AD%D9%83%D9%85%D8%A9-%D8%A7%D9%84%D8%AC%D9%86%D8%A7%D8%A6%D9%8A%D8%A9-%D9%84%D8%A5%D9%85%D9%84%D8%A7%D8%A1%D8%A7%D8%AA-%D8%A7%D9%84%D8%A7%D8%AD%D8%AA%D9%84%D8%A7%D9%84