CPI : le dernier recours des Palestiniens

CPI : le dernier recours des Palestiniens©Michael Rose
Implantation israélienne à Est Jerusalem
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 L’autorité palestinienne a posé le premier acte de sa coopération avec la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) en déposant jeudi après-midi un dossier confidentiel de plusieurs centaines de pages. En sortant de la Cour, le ministre des Affaires étrangères, Ryad Al-Malki, a affirmé ne pas tenter d’interférer dans l’examen préliminaire ouvert mi-janvier par Fatou Bensouda, mais simplement « coopérer », comme il en a l’obligation depuis l’adhésion de la Palestine à la CPI le 1er avril, assurant que les Palestiniens ont « choisi de chercher à obtenir justice et non vengeance ».

Le document, dont les Palestiniens ont livré en substance le contenu, pointe « les crimes de guerre » et d’autres crimes commis par « des individus de la direction israélienne ». Les Palestiniens visent en particulier la politique de colonisation et « les attaques contre la bande de Gaza et la population civile » et dénoncent « une attaque généralisée et systématique (…) continuellement perpétrée contre le peuple palestinien ». Quelques jours avant d’adhérer à la Cour et d’en devenir le 123ème Etat partie, Ramallah avait demandé au procureur d’enquêter sur la dernière guerre de Gaza de l’été 2014. Cette fois, le document, préparé par le Conseil national supérieur chargé du dossier CPI, pointe donc plus largement la politique israélienne.

Enquêtes

Ce conseil avait été établi par décret du président Mahmoud Abbas le 7 février. Dirigé par le négociateur palestinien Saeb Erekat, il comprend 40 personnes, ministres, membres des différentes factions palestiniennes, et des forces de sécurité. Le document a aussi été alimenté par la société civile palestinienne. Plusieurs rapports y ont été annexés, dont celui de la Commission d’enquête indépendante de l’Onu sur l’opération « Bordure Protectrice », rendu public le 22 juin. Il pointe « de possibles crimes de guerre » commis par Israël et des groupes armés palestiniens. Mais surtout, il fustige Israël pour « l’impunité qui prévaut à tous les niveaux » et lui demande de « renverser son bilan lamentable ». Ils recommandent à Tel Aviv de « veiller à ce que ces enquêtes ne soient pas confinées aux seuls soldats, mais englobent également des membres de l’establishment politique et militaire, y compris à l’échelon le plus haut ». Ces conclusions pourraient peser dans la décision de la procureure, qui au cours de son examen, doit déterminer si l’Etat ciblé a les capacités et la volonté politique d’engager des poursuites. La Cour n’intervenant qu’en dernier recours.

prochaine étape

Pour l’instant, il s’agit d’informations remises, à grand renfort de publicité, au procureur, mais pas d’un renvoi, juridiquement plus fort. Une procédure que les Palestiniens pourraient emprunter à l’avenir, expliquent-ils, si le dossier devait s’enliser. Les textes de la Cour ne prévoient en effet aucune date limite, et d’autres examens préliminaires, comme celui de l’Afghanistan, ont débuté il y a plus de huit ans, sans qu’aucune décision n’ait été prise à ce jour. « Si les Palestiniens avaient présenté un renvoi, la situation aurait suscité plus de préoccupation pour Israël, commente l’avocat israélien, Nick Kaufman, qui a aussi plaidé des dossiers devant la CPI. « Cela aurait obligé la Cour à constituer une chambre préliminaire et donner aux Palestiniens une ‘adresse’ à laquelle se plaindre de la vitesse des activités du bureau du procureur ».

La prochaine étape devrait être l’envoi d’une équipe du bureau du procureur dans la région. L’occasion de voir si toutes les factions palestiniennes, y compris le Hamas, sont prêtes à coopérer, comme l’assure Ramallah.  Les Etats-Unis qui ne sont pas membres de la CPI ont "clairement indiqué être opposés à des actions contre Israël devant la CPI car elles sont contreproductives". De leur côté, les autorités israéliennes  ont accusé les Palestiniens de vouloir "manipuler la CPI". Après l’adhésion palestinienne à la Cour, le gouvernement avait un temps gelé les rentrées fiscales, de 106 millions d’euros mensuel, collectées pour le compte des Palestiniens.