Le leader des Bosniaques Bakir Izetbegovic a accusé jeudi le chef des Serbes de Bosnie de "jouer avec le feu" avec un référendum sur une "fête nationale" de cette communauté, dans un pays toujours déchiré, plus de vingt ans après la guerre.
Le patron de la Republika Srpska (RS) "Milorad Dodik joue très sciemment avec le feu et il essaie toujours de faire un pas de plus, de faire bouger la frontière de ce qui est acceptable dans cet Etat et de ce qui est acceptable pour la communauté internationale", a dénoncé Bakir Izetbegovic dans une réponse par mail à des questions de l'AFP.
Depuis la guerre (1992-95) qui a fait quelque 100.000 morts, la Bosnie est séparée entre une entité croato-musulmane et la Républika Srpska (RS). Unies par de faibles institutions fédérales, ces entités entretiennent des relations difficiles.
La Republika Srpska célèbre sa "fête nationale" le 9 janvier, date de la proclamation en 1992 d'une "République du peuple serbe", trois mois avant le conflit.
Chef politique de la communauté bosniaque musulmane, Bakir Izetbegovic avait saisi la Cour suprême bosnienne qui avait déclaré inconstitutionnelle cette "fête nationale", expliquant que les non-Serbes vivant en RS ne s'y reconnaitraient pas.
En réponse, Milorad Dodik, adepte de la rhétorique nationaliste, a annoncé un référendum le 25 septembre. Il a déjà par le passé menacé d'organiser un référendum sur l'indépendance de la Republika Srpska qu'il dirige depuis dix ans.
Milorad Dodik était "généralement prêt à reculer lorsqu'il marchait sur la ligne rouge". "S'il la dépasse, ça ne se passera pas sans conséquences", a averti M. Izetbegovic.
"Les instruments existent" pour empêcher ce référendum, acte "contre l'accord de paix de Dayton", remise en cause "des principes instaurés il y a 21 ans (...) qui ont rendu possible la paix dans ce pays", selon Bakir Izetbegovic.
Le représentant de la communauté internationale, actuellement l'Autrichien Valentin Inzko, dispose de pouvoirs discrétionnaires lui permettant de limoger des élus et d'intervenir dans la législation du pays.
Bakir Izetbegovic a mis en cause "la motivation politicienne" de Milorad Dodik, avec un référendum en pleine campagne pour les municipales du 2 octobre.
Le chef de la RS est confronté à une grogne de son opposition. Mais tous les partis de l'entité le soutiennent sur la "fête nationale".
Mercredi, il a dit sa volonté d'organiser un référendum susceptible de remettre en cause la compétence de la justice centrale bosnienne sur les crimes graves, dont les crimes de guerre.
Sur 3,5 millions d'habitants que compte la Bosnie, 1,2 vivent en Republika Srpska, où les Serbes représentent 81,5% de la population.