L'accusation a soutenu jeudi que l'ouverture par Kigali d'une enquête sur le rôle de vingt responsables français dans le génocide rwandais devait "impérativement rester à l'extérieur" du procès en appel de Pascal Simbikangwa pour complicité dans les massacres de 1994.
Premier Rwandais condamné en France pour le génocide des Tutsi en 1994, Pascal Simbikangwa est rejugé depuis le 25 octobre par la cour d'assises de Bobigny pour "complicité de génocide" et "complicité de crimes contre l'humanité".
Cet ex-officier de la garde présidentielle reconverti dans la police politique après un accident qui l'a laissé paraplégique en 1986 avait été condamné en 2014 à 25 ans de réclusion criminelle.
Alors que le verdict est attendu samedi, Kigali - qui accuse régulièrement la France d'avoir soutenu le régime génocidaire, puis protégé ses responsables dans leur fuite - a ouvert mardi une enquête sur le rôle de vingt responsables français dans le génocide.
"L'évocation d'une actualité très récente (...) doit impérativement rester à l'extérieur de ce procès, de cette audience", a soutenu au début de son réquisitoire un des deux avocats généraux, Rémi Crosson du Cormier.
La défense n'a de cesse de dénoncer la volonté de la France de s'acheter une "bonne conscience au rabais" avec le procès Simbikangwa.
"Nous n'avons aucune mission politique ou diplomatique (...). Nous n'avons reçu aucune instruction ni générale ni particulière", a encore affirmé l'avocat général.
Pour lui, le doute n'est pas permis: "Malgré son état d'homme infirme en chaise roulante", Pascal Simbikangwa "a bien fourni des armes" aux miliciens qui tenaient des barrages routiers au passage desquels étaient filtrés et assassinés des Tutsi.
Soulignant la "force de vie, de survie" que l'accusé manifeste encore aujourd'hui, il a enjoint la cour d'imaginer "le capitaine avant ses huit ans de détention, ses 14 années d'exil".
"Il était tout sauf un citoyen ordinaire, un officier subalterne, mais bien un dignitaire d'un régime qui avait tout avantage à lui fournir des privilèges récompensant son zèle et son dévouement politique"", a-t-il dit.
Le réquisitoire doit se poursuivre dans l'après-midi.
Arrêté à Mayotte en 2008 pour trafic de faux papiers, Simbikangwa est jugé en France au titre de la "compétence universelle" prévue pour les crimes les plus graves.