La Cour de cassation examinera le 17 mars les pourvois concernant deux Syriens qui contestent la compétence des juridictions françaises pour les poursuivre et les juger pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis dans leur pays, a-t-on appris mardi auprès d'avocats.
Le parquet général près la Cour de cassation a confirmé auprès de l'AFP la date de cette audience, cruciale pour le devenir de toute une série d'enquêtes du pôle crimes contre l'humanité du tribunal judiciaire de Paris.
Le procureur général François Molins avait demandé que ces pourvois soient examinés en assemblée plénière, la formation la plus large et la plus solennelle de la Cour de cassation, qui n'est saisie que pour trancher les questions importantes ou inédites.
L'examen par cette assemblée plénière de la difficulté de la double incrimination pour les crimes contre l'humanité comme les crimes de guerre aboutira à un arrêt qui s'imposera à toutes les juridictions françaises.
Cette décision a été prise par M. Molins après l'émoi suscité en novembre 2021 par une décision de la Cour de cassation concernant un ancien soldat syrien, Abdulhamid Chaban, mis en examen pour complicité de crimes contre l'humanité.
La plus haute juridiction de l'ordre judiciaire avait considéré que la justice française n'était pas compétente pour examiner les accusations qui le visaient.
Elle s'était appuyée sur le principe de la double incrimination, prévu dans la loi du 9 août 2010, selon lequel les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre doivent être aussi reconnus dans le pays d'origine du suspect que la France entend poursuivre.
Or, la Syrie, comme d'autres pays, ne reconnaît pas ces crimes et n'a pas ratifié le statut de Rome qui a créé la Cour pénale internationale.
Cette affaire, qui a suscité de vives inquiétudes notamment au sein des ONG et des magistrats, revient devant la Cour de cassation car la fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) a fait opposition au motif qu'elle n'avait pas été informée du premier pourvoi et n'avait donc pu présenter ses arguments lors de la première audience devant la Cour de cassation.
En avril dernier, la cour d'appel de Paris avait adopté une position inverse en maintenant la mise en examen pour torture et crimes de guerre de Majdi Nema, un autre Syrien, mis en examen pour crimes de guerre.
Les magistrats avaient écarté l'argument selon lequel la condition de la double incrimination n'était pas remplie, avait expliqué le procureur général Rémy Heitz.
Les avocats de la défense ont aussitôt formé un pourvoi contre cette décision.
Les deux Syriens avaient été interpellés alors qu'ils séjournaient en France, Majdi Nema en janvier 2020 et Abdulhamid Chaban en février 2019.

