Ex-gendarme rwandais jugé pour génocide: la défense demande l'acquittement

La défense de l'ex-gendarme rwandais Philippe Hategekimana, 66 ans, naturalisé français sous le nom de Philippe Manier et jugé par la cour d'assises de Paris pour génocide et crime contre l'humanité, a réclamé mardi son acquittement en dénonçant une accusation "bâtie sur du sable".

"Le doute doit profiter à l'accusé. C'est un impératif catégorique, ce n'est pas un choix", a martelé Me Alexis Guedj en s'adressant directement aux jurés.

"Le génocide des Tutsis est une abomination que rien ne pourra jamais réparer" mais "on ne peut pas condamner M. Manier sur des a priori", a-t-il souligné.

Comme lors des débats à l'audience, la défense a mis en cause la crédibilité de la centaine de témoins, quasiment tous à charge, qui se sont succédé à la barre depuis le 10 mai.

Quasiment aucun témoin n'a été en mesure d'identifier formellement l'accusé, ont rappelé les avocats. "Nous avons eu des témoignages par ouï-dire", a ainsi déploré Me Fabio Lothe. "+On a entendu dire que+... a été la phrase la plus employée par les témoins", a-t-il dit. "+Biguma+ (le surnom de Philippe Manier, ndlr) c'est un peu le monstre du Loch Ness ou la bête du Gévaudan", a-t-il ironisé.

Pour Emmanuel Altit, autre avocat de l'ex-gendarme, les témoignages à charge de prisonniers depuis leur prison à Kigali, les plus accablants pour l'accusé, sont particulièrement sujet à caution. "Le Rwanda n'est pas un Etat de droit mais une dictature. Les témoins détenus sont à la merci des puissants", a-t-il soutenu.

"Il n'y a pas assez d'informations crédibles. Il y a trop de doutes", a-t-il lancé, avant de dénoncer "la faiblesse et les lacunes béantes" du dossier d'accusation. Il a exhorté la cour à "éviter une condamnation hâtive et fragile".

Selon Me Altit, son client est "un bouc émissaire" d'un jeu politique entre Paris et Kigali. Or, a affirmé Me Guedj, "le complexe de culpabilité de Paris pour son rôle dans le génocide des Tutsis du Rwanda ne permet pas de désigner des coupables qui ne le sont pas".

Le parquet a requis lundi la réclusion criminelle à perpétuité à l'encontre de Philippe Manier en le présentant comme un "maillon fondamental de la mise en oeuvre du génocide".

L'ancien adjudant-chef est le cinquième accusé renvoyé aux assises en France pour des crimes commis au cours du génocide au Rwanda qui a fait plus de 800.000 morts selon l'ONU, essentiellement des Tutsis exterminés entre avril et juillet 1994.

Le verdict est attendu mercredi.

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