22.09.10 - TPIR/MIL I - BAGOSORA DEMANDE L'AUDITION D'UN EX-MINISTRE DE LA DEFENSE DU REGIME ACTUEL

Arusha, 22 septembre 2010 (FH) - Le colonel Théoneste Bagosora, condamné en première instance par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), demande à la chambre d'appel d'ordonner la comparution du général Marcel Gatsinzi, ancien ministre de la Défense sous le régime actuel, a-t-on appris mercredi de source judiciaire.

3 min 2Temps de lecture approximatif

Le colonel Bagosora, le plus célèbre des détenus du TPIR, n'a pas réussi à obtenir, en première instance, la déposition du général Gatsinzi qui fut chef d'état-major intérimaire de l'armée rwandaise durant les premiers jours du génocide des Tutsis.

Directeur de cabinet au ministère de la Défense au moment des faits, Bagosora comparaîtra en appel, à une date encore à fixer, avec deux autres officiers condamnés, comme lui, à la perpétuité.

Dans une requête en anglais consultée mercredi sur le site internet du tribunal, le colonel demande à la chambre d'appel d'ordonner que l'ex-ministre de la Défense qui détient actuellement le tout nouveau portefeuille de la Gestion des catastrophes naturelles et des réfugiés, vienne témoigner « de vive voix au siège du tribunal à Arusha », en Tanzanie.

Le 18 décembre 2008, le colonel a été reconnu coupable de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre. Le colonel, qui avait été présenté par le parquet tout au long du procès comme le "cerveau" du génocide, a été, en revanche, acquitté du chef d' «entente en vue de commettre le génocide ».

Les juges de première instance ont conclu à sa responsabilité dans l'assassinat du Premier ministre de l'époque, Agathe Uwilingiyimana, des dix casques bleus belges qui étaient chargés de la protéger, de plusieurs dirigeants politiques et de massacres de Tutsis à des barrages routiers dans la ville de Kigali et dans sa région d'origine de Gisenyi (nord), entre la soirée du 6 avril et le 9 avril 1994.

Selon le jugement, Bagosora était, en l'absence du ministre de la Défense et après le décès du chef d'état-major de l'armée, la plus haute autorité militaire du Rwanda au cours de cette période. Ce que l'appelant a toujours contesté, affirmant n'avoir jamais exercé de contrôle, ni de fait, ni de droit, sur l'armée.

A sa demande, la chambre de première instance avait, lors du procès, ordonné le 11 septembre 2006, la comparution du général Gatsinzi qui fut chef d'état-major intérimaire de l'armée rwandaise du 7 au 16 avril 1994.

Le ministre avait alors posé des conditions à sa déposition : être entendu comme témoin de la chambre et non de Bagosora, ce que la chambre avait refusé. Gatsinzi avait également demandé à déposer en vidéoconférence.

Les choses en sont restées là jusqu'à la fin du procès.

Dans leur mémoire d'appel déposé au début de l'année, les avocats de Bagosora reprochaient à la chambre de première instance  d'avoir « cédé à la volonté de Gatsinzi qui refusait de venir témoigner ». Selon eux, les premiers juges « auraient dû demander au gouvernement rwandais de coopérer avec le tribunal comme le leur permettait le statut (du TPIR) en contraignant Gatsinzi à venir témoigner ».

« La chambre a privé la défense du colonel Bagosora d'un moyen de défense fondamental », concluaient les défenseurs.

L'ex-directeur de cabinet a comparu en première instance avec l'ancien chef des opérations militaires à l'état-major de l'armée, le général Gratien Kabiligi, l'ancien commandant du secteur opérationnel de Gisenyi (nord), le lieutenant-colonel Anatole Nsengiyumva et l'ancien commandant du bataillon paracommando, le major Aloys Ntabakuze.

Egalement condamnés à la perpétuité, Nsengiyumva et Ntabakuze seront jugés avec Bagosora en appel.

Quant à Kabiligi, il a été acquitté, faute de preuve, et le procureur n'a pas jugé utile de faire appel.

ER/GF

© Agence Hirondelle