Libérée sous caution après presque sept ans derrière les barreaux, la militante philippine des droits humains, Leila de Lima, s'est fixé pour objectif d'amener l'ex-président Rodrigo Duterte, un "tueur de masse" devant la justice.
Cette farouche opposante de l'ex-président - dont la meurtrière guerre antidrogue fait l'objet d'une enquête internationale pour de possibles crimes contre l'humanité - souligne prendre ses précautions face à de possibles représailles du camp Duterte.
"C'est un tueur de masse tout à fait capable de s'en prendre à quelqu'un qu'il pense être son ennemi", affirme l'ancienne sénatrice et ministre de la Justice (2010-2015), dans un entretien accordé à l'AFP.
Avant son arrestation, en février 2017, cette avocate de 64 ans avait enquêté durant dix ans sur les milliers de personnes présumées avoir été tuées par les "escadrons de la mort" que Rodrigo Duterte est accusé d'avoir mis en place quand il était maire de Davao (sud), puis maintenus au début de son mandat de président.
Une recherche de justice dont elle a payé le prix fort, jetée en prison pour des accusations de trafic de drogue, jugées fantaisistes par les défendeurs des droits humains et elle-même. Deux des trois chefs d'accusation retenus contre elle ont été abandonnés.
Liberée sous caution le 13 novembre, elle veut désormais que l'ex-président "rende des comptes" pour avoir "ordonné la persécution" qu'elle a subie. Ses avocats, dit-elle, préparent des plaintes contre lui.
Sans "totalement exclure" un retour en politique, elle entend aussi contribuer à l'enquête menée par le procureur de la Cour pénale internationale sur la campagne antidrogue menée par le gouvernement de Rodrigo Duterte, dans laquelle plus de 6.000 personnes ont trouvé la mort.
Désormais âgé de 78 ans, l'ex-président "doit affronter les rouages de la justice", "il doit rester vivant" pour ce faire, insiste-t-elle.
"Toujours la même", "critique de tout ce qui n'est pas bon dans notre société, critique des abus au sein du gouvernement", elle avoue toutefois se sentir désorientée depuis sa sortie de prison, et met en avant les "dommages incalculables" de ses années perdues.
Il semble désormais probable qu'elle soit acquittée de la dernière accusation la visant. Mme De Lima avait perdu sa réélection au Sénat en mai 2022 après avoir mené campagne derrière les barreaux.
M. Duterte, auquel la Constitution interdisait de briguer un second mandat, a lui quitté le pouvoir le mois suivant.

