19.11.10 - CPI/BEMBA - LE PROCES DE JEAN-PIERRE BEMBA DEBUTE LUNDI DEVANT LA CPI

La Haye, 19 novembre 2010 (FH) - La Cour pénale internationale (CPI) ouvrira, lundi, le procès de Jean-Pierre Bemba. Le sénateur congolais, président du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), l'un des principaux partis d'opposition au régime de Kinshasa, est accusé de crimes contre l'humanité et crimes de guerre pour meurtres, viols et pillage, commis en Centrafrique entre le 26 octobre 2002 et le 15 mars 2003. Arrêté dans sa résidence en banlieue de Bruxelles, en Belgique, le 24 mai 2008, Jean-Pierre Bemba avait été transféré à la CPI le 3 juillet.

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Le patron du MLC avait envoyé ses soldats à Bangui à la demande du président centrafricain Ange-Félix Patassé pour soutenir le régime, menacé par la rébellion du Général François Bozizé, aujourd'hui au pouvoir.

Ange-Félix Patassé avait fait appel à de nombreux mercenaires pour tenter de sauver son régime. Mais à l'exception des hommes du MLC, aucun d'entre eux n'a été inquiété par la CPI.

Selon le procureur, qui a ouvert son enquête en mai 2007 à la demande de Bangui, l'appel du président centrafricain a permis au MLC de « faire de la RCA une base arrière stratégique (...) et d'atténuer les risques d'attaques du gouvernement de la RDC contre son mouvement ».

En dépit des nombreuses années de guerre menée par le MLC sur le sol congolais, l'accusé n'est poursuivi que pour les actes criminels qu'auraient commis ses hommes en Centrafrique.

Ces actes portent essentiellement sur les viols commis par les soldats de M. Bemba en Centrafrique et sur sa responsabilité en qualité de supérieur hiérarchique. « De nombreuses femmes ont contracté le VIH ou sont tombées enceintes du fait des viols, parfois collectifs », selon le procureur, qui devra défendre sa thèse devant trois juges, trois femmes.

Il affirme aussi que, en Centrafrique, « les hommes étaient également violés dans le cadre d'une tactique délibérée d'humiliation et afin de démontrer leur impuissance à protéger leur famille ».   

Pour les avocats de Jean-Pierre Bemba, maître Aimé Kilolo, du barreau de Bruxelles et maître Richard Nkwebe Liriss, du barreau de Kinshasa, le procès intenté contre Jean-Pierre Bemba est politique. « Pour Kabila [président de la RDC], la remise de l'accusé à La Haye était la solution idéale pour éviter la perspective d'un futur défi électoral de la part de son ennemi politique », estiment-ils.

Au début de la procédure, le procureur, Luis Moreno Ocampo, avait aussi ciblé l'ex- président Ange-Félix Patassé. Aucun mandat d'arrêt n'a cependant été délivré contre ce dernier. Aujourd'hui, le procureur affirme ne pas avoir de preuves suffisantes. Rentré de son exil au Togo, Ange-Félix Patassé est désormais candidat à la présidentielle en Centrafrique, prévue le 23 janvier 2011.

A l'ouverture du procès, 135 victimes seront représentées à la Cour. Mais la chambre de première instance, qui a déjà reporté le procès à trois reprises, n'a toujours pas répondu aux demandes émanant de 1200 autres victimes centrafricaines.

D'autres victimes congolaises avaient demandé aux juges d'étendre les accusations portées contre Jean-Pierre Bemba aux crimes commis en 2002, en Ituri, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC). Les juges ont rejeté la demande, le 25 octobre, au motif que le procureur n'avait pas encore bouclé formellement son enquête en Ituri. Cette décision a provoqué la stupeur de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) et de plusieurs organisations congolaises, qui ont estimé qu'il existe des « éléments permettant de conclure que le procureur n'a pas l'intention de poursuivre » et ont reproché à la chambre préliminaire, chargée de la mise en état du procès, de ne pas « assumer son rôle de contrôle des décisions et omissions du procureur ».

Incarcéré depuis le 24 mai 2008, suite à son arrestation dans une banlieue de Bruxelles, Jean-Pierre Bemba recevra, lundi, le soutien de ses partisans qui prévoient de manifester devant la CPI à l'ouverture du procès.

SM/ER/GF

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