Gatete devrait faire appel de sa condamnation.
Selon ce livre en kinyarwanda, intitulé Comment le génocide des Tutsis a été perpétré dans l'ancienne commune de Murambi, Gatete aurait fait massacrer près de 3.000 Tutsis durant les cinq premiers jours du génocide dans cette commune, qu'il avait longtemps dirigée d'une main de fer avant d'être nommé haut cadre au ministère de la Famille.
« Du 7 au 11 avril 1994, près de 2.714 Tutsis ont été tués lors d'attaques dirigées par Gatete », écrit l'homme d'église (p.1), qui présente l'ancien responsable comme « une vieille connaissance, un ancien ami égaré ».
L'auteur, en plus de ses activités pastorales classiques, enseigne au Grand séminaire de Nyakibanda (sud).
Selon lui, ce livre est le fruit d'une longue recherche entreprise depuis 2006. « Il s'appuie donc sur des interviews et témoignages recueillis, de maison à maison, dans tous les secteurs, auprès de chaque famille de rescapés et d'anciens miliciens », a indiqué l'auteur dans une interview accordée à l'Agence Hirondelle.
Pour l'auteur, Gatete n'a fait que passer, en 1994, au dernier point d'un agenda dont l'exécution avait débuté aussitôt après son investiture à la tête de cette vaste commune en 1981.
« Gatete, assisté de ses lieutenants, Jean de Dieu Mwange et Augustin Nkundabazungu, a été l'instigateur et le superviseur du génocide dans toute la commune. S'il n'avait pas été là, des milliers de Tutsis seraient encore en vie », affirme encore le prêtre, aujourd'hui âgé de 43 ans, dans son entretien avec l'Agence.
M. Nkundabazungu, ancien trésorier de la commune Murambi, a été arrêté le 8 août dernier sur le sol ougandais, et directement extradé au Rwanda ; tandis que Mwange, le successeur de Gatete, à la tête de cette commune en 1993, est toujours en cavale.
Selon le livre (p.311), Gatete avait donné le ton du génocide en faisant tuer lui-même, en octobre 1990, plusieurs membres de l'élite tutsie de la commune. A cette époque, des milliers de Tutsis à travers le pays furent malmenés, jetés en prison ou tués suite à l'attaque, depuis l'Ouganda, des rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) actuellement au pouvoir.
Dans une lettre adressée le 20 novembre 1991 au président Juvénal Habyarimana, Gatete et les conseillers des 14 secteurs de sa commune affirmaient sans ambages : « Les Tutsis sont à l'origine de tous les maux que traverse actuellement la commune Murambi », révèle le livre à la page 30.
A la suite de cette lettre, poursuit l'auteur, chaque secteur fut doté de 150 miliciens interahamwe ayant suivi un entraînement militaire. A l'époque, leur arme principale était un gourdin garni de plusieurs clous dont l'usage devait par la suite s'étendre à tout le pays.
Le 7 avril 1994, au petit matin, poursuit l'abbé Rutinduka au quatrième chapitre de son livre, la machine à tuer de Murambi était donc rodée. S'y ajoutèrent des Hutus déplacés de communes alors occupées par les rebelles volant de victoire en victoire. Tout ce chapitre montre Gatete encadrant le génocide dans les 14 secteurs de sa commune, assisté des conseillers respectifs.
Pendant le génocide de 1994, Gatete était directeur au ministère de la Famille, un poste auquel il avait été nommé une année auparavant après avoir été relevé de ses fonctions à la tête de la commune Murambi.
La chambre de première instance du TPIR a conclu qu'il avait néanmoins continué à exercer son influence sur la police communale, les milices et les gendarmes dans sa région natale, et dans la préfecture voisine de Kibungo (Est).
SRE/GF
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