Washington accuse le Rwanda d'une attaque meurtrière sur un camp de déplacés en RDC

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La diplomatie américaine accuse le Rwanda d'être à l'origine d'un bombardement meurtrier vendredi sur un camp de déplacés dans l'est de la République démocratique du Congo, une affirmation récusée samedi par Kigali.

Au moins neuf personnes ont été tuées et des dizaines blessées dans l'attaque survenue à la périphérie de Goma (est de la RDC) où des combats opposent les forces gouvernementales au mouvement rebelle M23 soutenu par le Rwanda.

"Les Etats-Unis condamnent fortement l'attaque d'aujourd'hui des positions des forces armées du Rwanda et du M23 sur le camp pour personnes déplacées de Mugunga", a déclaré dans un communiqué vendredi le porte-parole du département d'Etat américain Matthew Miller.

Il a ajouté que les Etats-Unis sont "vivement inquiets de l'avancée récente" des forces armées du Rwanda et du mouvement du M23 dans l'est de la RDC, "ce qui a participé au déplacement de plus de 2,5 millions de personnes".

Le porte-parole du gouvernement en RDC, Patrick Muyaya, a accusé vendredi sur X "l'armée rwandaise et ses supplétifs terroristes du M23" d'en être responsables.

Appuyés par des unités de l'armée rwandaise, les rebelles du M23 (pour "Mouvement du 23 mars") ont repris les armes fin 2021 après plusieurs années de sommeil et se sont emparés de larges pans de territoire du Nord-Kivu, allant jusqu'à encercler presque entièrement Goma.

- Accusation "absurde" -

La porte-parole du gouvernement rwandais Yolande Makolo a réagi samedi à l'accusation américaine en la qualifiant de "ridicule" et d'"absurde", dans un post sur X.

"Comment parvenez-vous à cette conclusion absurde ? Les FDR (forces armées rwandaises), une armée professionnelle, n'attaqueraient jamais un camp" de déplacés, a-t-elle déclaré.

"Regardez (du côté des) FDLR et Wazalendo, sans foi ni loi, soutenus par les FARDC (forces armées congolaises), pour ce genre d'atrocités" a-t-elle ajouté.

Les FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda), sont un groupe armé créé par d'anciens responsables hutu du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, et dont la présence depuis 30 ans dans l'est de la RDC est dénoncée par Kigali.

L'origine des bombardements de vendredi n'est pas clairement établie.

"L'horreur dans sa forme la plus grave ! Une bombe sur des civils, des morts, des enfants ! Nouveau crime de guerre !", a écrit vendredi sur X le porte-parole du gouvernement de la RDC, Patrick Muyaya.

Selon des témoignages, des "bombes" sont tombées dans la matinée sur des huttes de déplacés de part et d'autre de la route menant de Goma à Saké, cité considérée comme un verrou stratégique à une vingtaine de km de la capitale provinciale.

Les Etats-Unis affirment depuis longtemps, comme Kinshasa, que la rébellion du M23 est soutenue par le Rwanda. Mais l'accusation par Washington d'une implication directe de Kigali est inhabituelle.

"Il est essentiel que tous les Etats respectent la souveraineté et l'intégrité territoriale de chacun", a ajouté M. Miller.

En visite cette semaine en France, le président congolais Félix Tshisekedi a répété qu'il ne serait "possible de discuter" avec le Rwanda qu'une fois que son armée "aurait quitté" la RDC.

Le président français Emmanuel Macron a de son côté exhorté le Rwanda à "cesser tout soutien" au M23 et à "retirer ses forces" du pays.

Le Rwanda de son côté réclame une action contre des combattants hutus réfugiés en RDC et suspectés d'être liés aux auteurs du génocide rwandais qui a principalement visé les Tutsi il y a trente ans.

Les Etats-Unis ont tenté à plusieurs reprises à servir de médiateur entre les deux parties, et la directrice du renseignement national américain, Avril Haines, s'est rendue en novembre en RDC et au Rwanda.

Le secrétaire d'Etat Antony Blinken a rencontré le président Kagame cette année, et exprimé l'espoir de voir des progrès diplomatiques pour faire avancer la paix dans l'est de la RDC.