Un responsable de l'opposition sud-soudanaise a accusé dimanche le gouvernement du président Salva Kiir de préparer un "génocide" ciblant l'ethnie nuer après que l'exécutif a qualifié d'"hostiles" la majorité des comtés où elle est présente.
Riek Machar, rival historique de Salva Kiir et vice-président, arrêté le mois dernier après plusieurs semaines d'affrontements entre les forces des deux hommes, appartient à l'ethnie nuer, l'une des plus importantes du pays.
"Cette communauté s'étend sur 16 comtés (...) Parmi ces comtés, neuf sont considérés comme hostiles au gouvernement, principalement alignés au SPLM/A-IO", le parti du vice-président Machar et sa branche armée, ajoute le texte citant entre autres Nasir et Ulang.
"Cette qualification dangereuse (...) ne constitue rien d'autre qu'une indication sur la cartographie d'un génocide contre la communauté nuer", a déclaré Reath Muoch Tang, un député et haut responsable du parti de M. Machar.
Un autre proche de Machar, citant un rapport de l'Union africaine, a rappelé qu'en 2013, des hommes nuer ont été "ciblés, identifiés, tués sur place" ou bien regroupés avant d'être exécutés.
- "profilage ethnique" -
"Nous mettons en garde et condamnons fermement la perpétuation de la politique étatique de profilage ethnique, de ciblage et de nettoyage ethnique", a déclaré Oyet Nathaniel Pierino, un porte-parole du SPLM/A-IO dans un communiqué.
Il a ajouté qu'il saisirait la Cour pénale internationale (CPI) si des crimes contre l'humanité et de génocide venaient à être commis.
Des affrontements début mars autour de Nasir, dans l'Etat du Nil supérieur (nord-est), ont contribuer à faire échouer l'accord de partage du pouvoir entre Salva Kiir et Riek Machar.
Les alliés du président accusent les forces du vice-président d'y fomenter des troubles en collaboration avec l'Armée blanche, une milice de jeunes armés issus de la communauté ethnique nuer.
On estime que 6.000 combattants de cette milice ont envahi un campement militaire à Nasir à cette période, tuant entre autres un général de haut rang. Le gouvernement affirme que 400 membres des forces sud-soudanaise (SSPDF) ont été tués.
Les forces gouvernementales ont affirmé avoir repris il y a près d'une semaine la ville de Nasir ainsi qu'Ulang, avec le soutien des forces ougandaises.
Un regain de tensions dans plusieurs Etats ont fait selon l'ONU au moins 200 morts et déplacé quelque 125.000 personnes depuis mars dernier.
- "Plan d'action" -
Ces affrontements et l'arrestation du vice-président font craindre le retour à la guerre civile dans le plus jeune pays du monde, riche en pétrole mais extrêmement pauvre, près de 7 ans après la fin d'un conflit qui avait fait quelque 400.000 morts et quatre millions de déplacés.
Les combats avaient entre 2013 et 2018 opposé les partisans de M. Kiir, qui a appartient à l'ethnie dinka à ceux de M. Machar. Les communautés dinka et nuer composent les deux groupes les plus importants de la mosaïque ethnique sud-soudanaise.
Le gouvernement sud-soudanais a évoqué samedi un "plan d'action" pour rétablir l'accord de paix, suggérant de choisir quelle faction de l'opposition - divisée depuis l'arrestation de Machar - est légitime, et ouvrant ainsi la voie à l'éviction de M. Machar, selon les médias sud-soudanais.
M. Pierino, proche de M. Machar, a averti que "toute tentative de modifier la structure du gouvernement de transition, de remplacer les personnes qui y sont nommées (...) doit être rejetée et combattue par tous les moyens à notre disposition".