Le parquet antiterroriste a demandé la localisation d'une vingtaine "d'agents du régime" syrien, dont l'ancien président Bachar Al-Assad, dans les investigations pour crimes contre l'humanité portant sur la mort de journalistes à Homs en 2012, a appris mardi l'AFP de source judiciaire.
Le Parquet national antiterroriste (Pnat) suspecte "l'existence d'un plan commun" pour bombarder le centre de presse de Bab Amr, attaque qui a été précédée d'une réunion, la veille, avec "l'ensemble des responsables des forces militaires et sécuritaires de Homs".
Dans un réquisitoire supplétif daté du 7 juillet, dont l'AFP a eu connaissance mardi, il demande aux juges d'instruction saisis des investigations de localiser une petite vingtaine de personnes, dont des proches de Bachar al-Assad.
Figurent parmi les mis en cause: Maher al-Assad, frère du président aujourd'hui déchu et chef de facto de la 4e division blindée syrienne au moment des faits; Ali Mamlouk, directeur des renseignements généraux syriens au moment des faits, Ali Ayoub, chef du comité sécuritaire et militaire de Homs en février 2012, Rafiq Shahada, chef sécuritaire et militaire de Homs au moment des faits...
Cette "initiative du Pnat" constitue "une avancée notable en faveur de la lutte contre l'impunité", ont réagi auprès de l'AFP Mes Matthieu Bagard et Marie Dosé, qui représentent Edith Bouvier, journaliste grièvement blessée pendant le bombardement. "Il est temps que des mandats d'arrêt soient délivrés", a aussi ajouté Me Marie Dosé.
"Nous avons déjà demandé, en mars, que ces mandats d'arrêt soient émis", a souligné de son côté Me Clémence Bectarte, avocate de la famille de Rémi Ochlik, tué lors du bombardement, de la Fédération internationale des droits humains (FIDH) et du Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression (SCM).
"Nos clients ont un sentiment d'impatience: il y a déjà eu 14 mandats d'arrêt émis depuis Paris à l'encontre de responsables syriens dans d'autres affaires, mais aucun dans ce dossier, alors que c'est le plus vieux dossier instruit à Paris visant la responsabilité de membres du régime de Bachar al-Assad".
Le 21 février 2012, des journalistes occidentaux, qui venaient d'entrer dans Homs assiégée par les troupes de Bachar al-Assad, se sont retrouvés dans une maison transformée en centre de presse du quartier de Bab Amr, un bastion de la rébellion de l'Armée syrienne libre (ASL).
Au petit matin, ils ont été réveillés par des détonations et ont compris que le quartier était visé par les troupes du régime. Deux journalistes, Marie Colvin, 56 ans, et Rémi Ochlik, 28 ans, ont été tués par un obus de mortier.
A Paris, dès mars 2012, le parquet ouvre une enquête pour les victimes françaises pour meurtre et tentative de meurtre. En octobre 2014, l'enquête est élargie à des faits de crimes de guerre, et en décembre 2024, à des faits de crimes contre l'humanité, un développement inédit en ce qui concerne des victimes journalistes.