Le gouvernement colombien a octroyé vendredi plus d'un millier de titres de propriété de terrains, d'une superficie équivalente à 1.350 stades de foot, aux paysans de l'une des communes les plus touchées par le conflit armé.
Le président Ivan Duque a remis ces 1.058 titres, correspondant à 295 parcelles formalisées et à 763 terrains vagues, à des centaines de paysans de la municipalité d'Ovejas, dans le département de Sucre (nord), théâtre d'un massacre commis par des paramilitaires d'extrême droite en 2001.
"Aujourd'hui s'ouvre à Ovejas le cadastre des 170 communes les plus affectées par la violence", a déclaré le chef de l'Etat lors de la plus importante légalisation de terres réalisée dans une municipalité colombienne, avec une superficie totale de 1.395 hectares.
Une ambitieuse réforme agraire est prévue dans l'accord de paix, signé en 2016 par l'ex-guérilla Farc et l'ancien président centriste Juan Manuel Santos (2010-2018).
Bien qu'il s'agisse du thème le plus sensible de ce pacte historique - les revendications de terres par les paysans colombiens étant à l'origine même de la guerre - c'est le point le moins avancé de sa mise en oeuvre, selon l'Institut Kroc, responsable du suivi de l'accord.
Le texte prévoit la répartition de trois millions d'hectares, la légalisation de sept millions d'autres au profit de petits propriétaires. Il recommande aussi un recensement national pour légaliser la totalité des propriétés en Colombie d'ici 2025, suite aux spoliations et occupations illégales survenues depuis le début de la guerre il y a plus d'un demi-siècle.
La commune d'Ovejas a été choisie car c'est "une zone connue pour le grand nombre de victimes, en particulier de veuves, qu'y a laissées le conflit", a déclaré à l'AFP Miguel Ocampo, directeur de l'Agence nationale des terres (ANT), chargée du processus.
Il y a 18 ans, à Chengue, l'un des hameaux de la municipalité, des paramilitaires ont assassiné, à coups de machettes et de pierres, 28 paysans qu'ils accusaient d'être des alliés des Farc. Ce massacre a été qualifié de crime contre l'humanité par le Parquet général.
"Maintenant oui, je peux dire que ce morceau (de terre) est à moi", s'est réjoui vendredi Emel Sequeda, 54 ans, qui a perdu un beau-frère lors de cette tuerie et a dû fuir avec ses cinq enfants.