22.09.2003 - TPIR/NDINDABAHIZI - « JE NE VEUX PLUS ENTENDRE PARLER DE TUTSIS », AURAIT D

Arusha, le 22 septembre 2003 (FH) – Un témoin entendu lundi par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) a allégué que l'ancien ministre des finances sous le gouvernement intérimaire, Emmanuel Ndindabahizi, aurait dit à des miliciens qu’il ne voulait plus entendre parler de Tutsis dans la province de Kibuye (ouest du pays). Emmanuel Ndindabahizi, 53 ans, répond de trois chefs D'accusation de génocide et de crimes contre l'humanité portant sur des massacres de Tutsis dans cette même province, dont il est originaire.

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Il plaide non coupable.

Dénommé CGB pour des raisons de sécurité, le treizième témoin de l’ accusation est un rescapé du génocide. Selon lui, l’accusé aurait déclaré à des miliciens vers la fin de mai 1994 : « Je pars, mais à mon retour, je ne veux plus entendre parler de Tutsis dans notre région ».

Les miliciens auxquels s’adressait Ndindabahizi tenaient le barrage routier de Gitaka, dans la commune de Gitesi, a précisé le témoin. Ndindabahizi les aurait pressés de tuer entre autres l’institutrice Tatiana Mukantabana alias Nyiramaritete et le paysan Cyprien Karegeya, selon CGB.

Il a indiqué qu’il était caché dans une petite maison désaffectée à une vingtaine de mètres du barrage routier. Selon lui, les deux personnes ont été tuées quatre jours plus tard par le maître d’école Joël Ndabukiye et son fils Emmanuel (pas autrement identifié).

L’accusé avait promis à Ndabukiye de le faire nommer préfet de Kibuye en guise de récompense pour les massacres des Tutsis, a rapporté CGB.

L’avocat principal de Ndindabahizi, le Français Pascal Besnier a demandé au témoin s’il n’ y avait pas de risque à se cacher à une vingtaine de mètres d’un barrage routier. CGB a répondu que l’endroit était le mieux indiqué dans la mesure où personne ne pouvait soupçonner qu’un Tutsi puisse chercher refuge si près d’un tel endroit.

L’avocat a par ailleurs confronté la déposition du témoin et sa déclaration écrite recueillie par les enquêteurs du TPIR en novembre 2000. « Vous avez dit aux enquêteurs avoir vu Ndindabahizi au début du mois de mai et vous dites aujourd’hui que c’était vers la fin mai (1994) ! », a fait remarquer Me Besnier.

Le témoin a répondu qu’il s’était trompé en 2000.

Au terme de la déposition de CGB, le représentant du procureur, le Nigérian Charles Adeogun-Phillips a annoncé que, des trois témoins restants, seule l'Américaine Alison Des Forges, historienne et activiste des droits de l'homme, était présente à Arusha.

Témoin expert, elle ne déposera qu’à partir de mercredi. Il n’y aura donc pas de débats mardi. La défense mettra cette journée à profit pour lire le rapport de Mme Des Forges dont la version française n’était pas encore disponible lundi en fin d’après-midi.

Les deux autres témoins seront entendus après la déposition de Mme Des Forges.

Emmanuel Ndindabahizi comparaît devant la première chambre de première instance du TPIR présidée par le juge norvégien Erik Mose, assisté de la Pakistanaise Khalida Rachid Khan et de l'Ougandaise Solomy Balungi Bossa.

ER/CE/GF/FH (NB'0922A)