Des tentes aux gratte-ciels: les Emirats fêtent leurs cinquante ans

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Ehab Fouad, 64 ans, était encore adolescent lorsqu'il a participé il y a cinquante ans à la parade célébrant la naissance des Emirats arabes unis, devenus l'un des pays les plus riches et influents du Golfe.

L'ingénieur égyptien désormais à la retraite se souvient avec émotion de ce 2 décembre 1971, lorsqu'il a vu pour la première fois le drapeau du nouveau pays et brandi fièrement le portrait du cheikh Zayed ben Sultan Al-Nahyane, père fondateur des Emirats.

"A chaque fois que je rencontre des gens ici, je leur raconte cette histoire", dit M. Fouad. Il vit à Dubaï, l'un des sept émirats de la fédération, avec Abou Dhabi, Charjah, Foujaïrah, Ajman, Oum Al-Qaïwaïn et Ras Al-Khaïmah, connus sous le nom d'Etats de la Trêve et sous protectorat britannique entre 1892 et 1971.

Le cheikh Zayed, à la tête de l'émirat pétrolier d'Abou Dhabi, le plus riche parmi ses six voisins, a souhaité les unir pour tenter de bâtir un Etat puissant.

Le pays comptait quelque 300.000 habitants à l'indépendance, contre environ 10 millions aujourd'hui, dont 90% d'étrangers, la plupart inéligibles à la citoyenneté en raison de règles strictes, comme M. Fouad.

Avec d'importantes réserves de pétrole et de gaz, les Emirats, très pauvres en 1971, sont devenus une puissance économique et politique incontournable au Moyen-Orient.

"Ici, certaines personnes avaient l'habitude de construire leurs maisons avec des branches de dattiers et des briques en argile. Aujourd'hui, il n'y a que des villas et des tours", raconte M. Fouad.

- Puissance régionale -

Des ONG accusent cependant les Emirats de violations des droits humains, ainsi que de crimes de guerre lors du conflit au Yémen, où les Emirats sont intervenus au sein d'une coalition menée par l'Arabie saoudite.

Malgré ces accusations, le pays attire de nombreux investisseurs et hommes d'affaires et tente de diversifier ses sources de revenus, notamment grâce au tourisme ou à la finance, afin d'être moins dépendant de la manne pétrolière.

Les Emirats sont un paradis fiscal avec un environnement relativement peu taxé, autorisant notamment le contrôle total des entreprises par des étrangers ou offrant des visas à long terme pour des travailleurs hautement qualifiés, comme les médecins, les ingénieurs, les scientifiques ou les artistes.

Dubai, ancienne ville perlière, s'est ainsi transformée en un important centre financier et commercial, avec ses forêts de gratte-ciels, dont la plus haute tour du monde, Burj Khalifa et ses 828 mètres.

Mais l'économie des Emirats, deuxième du monde arabe derrière l'Arabie saoudite, repose sur une main d'oeuvre à bas coût, venant pour la plupart d'Asie et d'Afrique, et généralement logée dans des camps ou des résidences fermées.

Le pays souhaite désormais s'affirmer comme une puissance régionale, en s'engageant dans des conflits, comme au Yémen, ou en faisant office de médiateur dans d'autres, au Moyen-Orient et en Afrique.

"Les Emirats ont longtemps été inquiets de leur relative vulnérabilité, dans une région où ils sont entourés par des Etats plus grands et plus puissants", explique à l'AFP Elham Fakhro, en charge du Golfe pour le centre d'analyse International Crisis Group (ICG).

"Après l'indépendance, la politique étrangère du pays était relativement neutre, mais est devenue plus affirmée après les printemps arabes" depuis 2011, explique-t-il, profitant de la perte relative d'influence de puissances régionales traditionnelles comme l'Egypte, l'Irak et la Syrie.

Les Emirats, partisans d'une ligne dure à l'égard de l'islam politique, ont pris en 2020 la décision surprise de normaliser publiquement leurs relations avec Israël, devant ainsi le premier pays arabe avec Bahreïn à établir des liens diplomatiques avec l'Etat hébreu depuis des décennies.

"En tant qu'acteur régional et international engagé, nous savons que nous avons besoin d'assumer plus de responsabilité pour la future orientation de notre région", a déclaré Anwar Gargash, conseiller présidentiel, lors d'un forum en novembre.