12.03.08 - CPI/OUGANDA - VISITE A LA CPI D'UNE DELEGATION DE L'ARMEE DE RESISTANCE DU SEIGNEUR

La Haye, 12 mars 2008 (FH) -  Une délégation de l’armée de résistance du Seigneur (ARS) a rencontré lundi des représentants du greffe de la Cour pénale internationale (CPI) mais le procureur, Luis Moreno Campo, a refusé de les recevoir.

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Dirigée par David Matsanga, le chef de la délégation rebelle aux négociations de paix qui se déroulent actuellement avec le gouvernement de Kampala, elle était venue à La Haye pour discuter des cinq mandats d'arrêt délivrés par le procureur en juillet 2005 contre leur chef, Joseph Kony, et quatre autres responsables pour des crimes commis dans le nord de l’Ouganda.
 
En guerre contre le régime de Yoweri Museveni depuis 1986, les rebelles auraient fait, selon les Nations unies, près de 100 000 morts, provoqué la fuite d’1,6 million de personnes et enlevé et enrôlé près de 25 000 enfants. Mais depuis juillet 2006, soit un an après l’émission des mandats d’arrêt par la CPI, des négociations de paix sont en cours. Fin février, plusieurs accords intermédiaires ont été signés dont l’un porte sur la mise en place d’une chambre spéciale crimes de guerre au sein de la Haute Cour ougandaise et la mise en place d’un système de justice transitionnelle.
 
Depuis le début des négociations, les rebelles conditionnent la signature d’un acte final de paix au retrait des mandats émis par la CPI après que le président Yoweri Museveni avait saisi le procureur en décembre 2004. Le procureur Luis Moreno Ocampo s’oppose à tout retrait des mandats.
 
Après avoir été recu par des responsables du greffe, Matsanga s’est dit « très satisfait » et a annoncé le dépôt, "dans les prochains jours", d’une requête "en admissibilité de l’affaire" devant la chambre préliminaire.
 
Par ailleurs, le représentant de la LRA a évoqué une récente décision des juges, demandant au gouvernement ougandais de fournir, d’ici le 28 mars, des détails sur l’accord relatif à la mise en place d’une chambre spéciale et sur l’exécution des mandats d’arrêt.
 
La Cour n’est compétente que lorsque les Etats n’ont pas la volonté ou les moyens de poursuivre les responsables de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre. En jugeant les responsables de crimes commis sur son sol, l’Ouganda pourrait donc mettre un terme à la procédure engagée par La Haye.
 
David Matsanga semble décidé à utiliser la décision des juges dans la dernière étape des négociations de paix. « Pourquoi le gouvernement a-t-il déféré cette affaire à la Cour ? Pourquoi le gouvernement ougandais a-t-il engagé des négociations alors qu’il est supposé arrêter ces personnes ? Pourquoi ont-ils signé des accords avec nous, contraires au statut de Rome ? » s'est il demandé. Pour le chef de la délégation ougandaise, "on ne peut signer un accord avec quelqu’un et lui passer ensuite les menottes". Selon lui les accords intermédiaires reviennent à un non lieu.
 
Tout au long des négociations, la Cour pénale internationale a ainsi été accusée de nuire aux négociations en cours. Mais une décision de retrait des mandats nuirait à la crédibilité de la Cour, estiment plusieurs observateurs. Les avis sont en revanche partagés sur l’utilisation de l’article 16 par le Conseil de sécurité, qui permettrait à ce dernier de suspendre les procédures, pour un an.
 
Selon plusieurs sources, fin fevrier, près de 200 rebelles auraient fui la République démocratique du Congo, où ils disposaient d’une base arrière, vers la République centrafricaine. Deux pays qui ont ratifié le statut de la Cour et sont tenus de coopérer avec elle.
 
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© Agence Hirondelle