Tout juste cinquante ans après la mort du général Franco, le gouvernement espagnol a approuvé mardi un projet de loi afin de déclassifier automatiquement tous les documents confidentiels datant de l'époque de la dictature.
Ce projet de "loi sur l'information classifiée", qui devra être soumis à l'approbation du Congrès, remplacera la "loi sur les secrets officiels" adoptée en 1968, donc pendant la dictature. Il était réclamé de longue date, notamment par le Parti nationaliste basque (PNV).
"Je répète: déclassification automatique de tous les documents classifiée de plus de 45 ans, c'est-à-dire avant l'année 1980", a résumé le ministre de la Justice, Felix Bolaños, lors d'un point de presse à l'issue du Conseil des ministres.
Si cette mesure reçoit l'aval du Parlement, le secret sera levé sur tous les documents datant de la dictature franquiste (1939/1975), mais aussi sur ceux correspondant à la Transition, la période mouvementée qui suivit la mort du dictateur.
Ce texte permettra d'adapter la législation espagnole "aux standards européens" et d'"offrir une plus grande transparence" en ce qui concerne les "informations sensibles", a poursuivi M. Bolaños.
Plusieurs tentatives ont eu lieu ces dernières années pour réformer la loi de 1968. La dernière, engagée par le gouvernement du Premier ministre socialiste Pedro Sánchez en 2020, avait été stoppée par la dissolution du Parlement en 2023, après un long bras de fer parlementaire.
Avec ce nouveau projet de loi, l'exécutif prévoit de rendre publics ces documents classifiées, sauf s'il persiste "une menace pour la sécurité nationale ou la défense" qui justifierait encore leur classification, a commenté le ministre de la Justice.
Le texte prévoit plus largement de rendre "exceptionnelle" la classification d'informations - qui devra être "dûment motivée" - et stipule que les documents relatifs à de graves "violations des droits humains ou à des crimes contre l'Humanité" ne pourront pas être classifiés.
L'adoption de ce projet de loi par l'exécutif a été saluée par Amnesty international, qui a appelé dans un message sur X les partis politiques espagnols à laisser de côté "leurs guerres partisanes" pour faciliter l'approbation rapide du texte au Parlement.
"Cette loi peut changer l'histoire", a estimé Amnesty, pour qui la loi de 1968 a été un obstacle pour "avancer dans les recherches sur les violations graves des droits de l'Homme", mais aussi pour "garantir le droit des victimes à la vérité, à la justice, à la réparation".
Arrivé à la tête de l'Espagne après une guerre civile ayant fait des centaines de milliers de morts, Franco a dirigé l'Espagne d'une main de fer durant près de 40 ans. Aucun responsable du régime n'a été jugé après sa mort, cette période ayant fait l'objet d'une vaste amnistie.
vab/CHZ/brk
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