Larmes de joie et longues embrassades: Maikel Olivera, Vénézuélien ayant passé quatre mois dans l'"enfer" d'une prison pour membres de gangs du Salvador après son expulsion par les Etats-Unis, a été chaleureusement accueilli chez lui mardi par ses proches.
Il fait partie des 252 migrants vénézuéliens incarcérés au Salvador depuis la mi-mars et rapatriés vendredi à Caracas.
Quatre longs jours se sont écoulés avant les retrouvailles avec les siens, entre démarches administratives, examens médicaux et entretiens avec le parquet vénézuélien, qui a ouvert une enquête contre le président salvadorien Nayib Bukele pour crimes contre l'humanité.
Maikel, 37 ans, est finalement arrivé mardi dans son quartier de la ville de Barquisimeto, à quelque 400 km de Caracas, au son des klaxons et applaudissements de ses voisins et proches.
"C'est une renaissance pour toi, mon chéri!", lui a lancé sa mère, Olivia Rojas, en l'enlaçant et en lui caressant le visage.
- "Coups 24/24" -
Après les accolades et les larmes, Maikel Olivera s'est confié à l'AFP sur sa détention au sein du tristement célèbre Cecot, redoutée prison de haute sécurité construite par le président Bukele dans le cadre de sa guerre contre les gangs.
"J'ai vécu un véritable enfer, c'étaient des coups 24 heures sur 24", se souvient-il. Les gardes "nous disaient: vous allez moisir ici, vous allez passer 300 ans en prison. Je pensais que je ne retournerais jamais au Venezuela".
"J'avais un ami gay, ils l'ont violé. Ils nous frappaient juste parce que nous nous lavions", a-t-il ajouté.
Invoquant une loi de 1798 sur les ennemis de l'étranger rarement utilisée, les Etats-Unis avaient expulsé en mars, sans procès et sans produire de preuves, ces 252 Vénézuéliens, accusés d'appartenir au gang Tren de Aragua.
Le président Bukele a accepté d'incarcérer au Cecot ces migrants en échange des millions de dollars promis par l'administration Trump, une initiative dénoncée par les organisations de défense des droits humains.
Après quatre mois coupés du monde, Maikel Olivera et les autres ont finalement été libérés dans le cadre d'un échange de prisonniers entre Caracas et Washington.
- "Nombreuses marques" -
Cette scène de liesse s'est répétée à Maracaibo (ouest), à environ 700 km de Caracas où une foule d'environ 300 personnes a accueilli plus tard mardi Mervin Yamarte.
Certains lançaient de la mousse, d'autres applaudissaient lorsqu'il est descendu d'une voiture le ramenant chez lui.
L'homme de 29 ans a éclaté en sanglots en apercevant sa femme Jeannelys, sa fille de six ans et sa mère Mercedes, qui l'a accueilli avec une étreinte interminable.
"Nous avons subi une véritable torture, j'ai de nombreuses marques sur le corps", a-t-il déclaré à l'AFP à son arrivée.
Une fois l'agitation passée, il a raconté aux siens ce qu'il avait vécu au Cecot. "Les 15 premiers jours, nous avons fait une émeute parce qu'ils voulaient abuser de nous", a-t-il dit.
Le procureur vénézuélien Tarek William Saab a présenté lundi les témoignages de certains des rapatriés, comme celui d'Andry Hernandez Romero, maquilleur et styliste de 33 ans, qui a dit avoir été victime de violences sexuelles par les autorités lors de sa détention.
Il a également montré des images de migrants présentant des ecchymoses sur tout le corps et des marques de balles en caoutchouc. L'un avait la lèvre fendue, un autre une cicatrice à l'épaule.
Le Venezuela fait lui même face à des accusations de torture envers des opposants politiques, privés du recours à des avocats privés. La Cour pénale internationale (CPI) enquête sur le gouvernement de Nicolas Maduro pour crimes contre l'humanité.
- "Tu nous as manqué" -
Mercedes Yamarte, 46 ans, attendait depuis des jours le retour de Mervin. Sa modeste maison était décorée avec des ballons aux couleurs du drapeau vénézuélien. Sur une banderole accrochée à l'extérieur, on pouvait lire: "Bienvenue dans ta patrie, tu nous as manqué".
Organisant des manifestations à Maracaibo et Caracas, rencontrant les autorités, faisant le tour des médias, la mère de famille avait remué ciel et terre pour sortir de prison son fils, dont elle était sans nouvelles.
Lorsque la nouvelle de la libération des détenus vénézuéliens s'est répandue la semaine dernière, des gens du quartier se sont rassemblés autour d'une télévision dans son salon pour essayer de repérer leurs proches parmi les passagers descendant des avions.
Parmi eux se trouvait Yarelis Herrera, 45 ans. Son fils Edwuar Hernandez, 23 ans, semble "très changé", a-t-elle confié à l'AFP, "il ressemble davantage à un homme maintenant".
Ces Vénézuéliens incarcérés au Salvador avaient entrepris un dangereux périple pour rejoindre les Etats-Unis en quête d'une vie meilleure, fuyant comme des millions d'autres un pays frappé par la crise économique.