29.05.10 - CPI/CONFERENCE - LA CPI OUVRE LA PREMIERE CONFERENCE DE REVISION DE SON STATUT

Kampala, 29 mai 2010 (FH) - Les 111 Etats parties à la Cour pénale internationale (CPI) débutent, lundi en Ouganda, leur première conférence de révision du Statut qui avait été adopté à Rome en juillet 1998. Depuis son établissement à La Haye, aux Pays-Bas, il y a huit ans, la CPI a ouvert cinq enquêtes - en Ouganda, en République démocratique du Congo, en Centrafrique, au Darfour et au Kenya - et émis 13 mandats d'arrêts. Seuls quatre ont été exécutés et la Cour n'a ouvert que deux procès, à l'encontre de deux chefs de milices congolais. Depuis huit ans, la CPI, qui dispose d'un budget de plus de 100 millions d'euros par an, n'a pas prononcé une seule condamnation.

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Deux points clés devraient rythmer les dix jours de débats qui se tiendront à Munyonyo, à quelques kilomètres de Kampala, sur les rives du lac Victoria. D'abord, l'adoption d'une définition juridique pour le crime d' « agression ». Selon les travaux préparatoires, l'agression est « l'emploi par un Etat de la force armée contre la souveraineté, l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre Etat ». Si l'adoption de cette définition - sur laquelle planche un groupe de travail depuis plus de dix ans - ne devrait plus susciter de grands débats, en revanche, les Etats ne sont pas parvenus à s'entendre  sur les conditions dans lesquelles le procureur pourra enquêter sur de tels crimes.

Plusieurs Etats demandent qu'un organe extérieur à la Cour - comme le Conseil de sécurité, l'Assemblée générale des Nations unies, ou encore la Cour internationale de Justice - acte l'existence d'une agression pour que le procureur puisse engager une enquête. Les ONG s'y opposent. Dans un communiqué, Human Rights Watch refuse « que des organes extérieurs exercent un contrôle sur des crimes relevant du mandat de la Cour » et exprime « son inquiétude à l'idée que la mise en application du crime d'agression pourrait impliquer la CPI dans des conflits hautement politiques entre Etats ».

Un autre projet d'amendement, émis par l'Union africaine et visant à limiter la marge de manœuvre du procureur, n'a pas été retenu à l'ordre du jour des débats mais la question de la justice internationale en Afrique fait incontestablement partie des préoccupations de Kampala. Depuis l'émission d'un mandat d'arrêt contre le président soudanais, Omar Al Bachir, en mars 2009, plusieurs Etats africains remettent en cause la légitimité de la Cour, souvent qualifiée de « justice de l'étranger », qui serait animée par des ambitions néo-colonialistes.

Au cours d'un débat préalable à la conférence, portant sur la Paix et la Justice, le greffier du Tribunal pénal international pour le Rwanda, Adama Dieng, a interrogé : « Qui vise les victimes africaines ? La CPI n'aurait aucune affaire en Afrique si nous n'avions pas contribué aux statistiques mondiales sur les abus, l'impunité et la destruction des vies des Africains ». La conférence de Kampala permettra aussi de dresser un bilan de la politique du procureur de la CPI, Luis Moreno Ocampo, notamment en Ouganda.

Une coalition de partis d'opposition au président Yoweri Museveni, Inter Party Cooperation, demande au procureur de répondre à l'une de ces requêtes concernant la répression d'une manifestation par l'armée ougandaise en septembre 2009. Mais le procureur reste silencieux. A ce jour, Luis Moreno Ocampo n'a émis que cinq mandats d'arrêt contre les chefs de l'Armée de résistance du Seigneur, qui après avoir semé la terreur dans le Nord de l'Ouganda, continue ses exactions en Centrafrique, en République démocratique du Congo (RDC) et au Sud-Soudan. En revanche, à ce jour, aucun responsable de l'armée ougandaise (UPDF) n'a été inquiété pour ses crimes commis au nord du pays.

SM/ER/GF

 © Agence Hirondelle