02.12.10 - FRANCE/RWANDA -MANDATS D'ARRÊTS:BRUGUIERE AVAIT CONSULTÉ LE GOUVERNEMENT FRANCAIS EN 2006

La Haye, 2 décembre 2010 (FH) - Le site Wikileaks a commencé, lundi 29 novembre, à publier des télégrammes diplomatiques (http://cablegate.wikileaks.org) en provenance du département d'Etat et de 274 ambassades à travers le monde. Rédigées entre le 28 décembre 1996 et le 28 février 2010, ces notes sont classées « secret » ou « confidentiel ».

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L'un de ces télégrammes, daté du 26 janvier 2007 et provenant de l'ambassade des Etats-Unis à Paris, relate une rencontre avec Jean-Louis Bruguière. Le juge anti-terroriste français, chargé de l'enquête sur l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion du président rwandais Juvénal Habyarimana, au cours duquel trois membres français de l'équipage avaient aussi trouvé la mort, avait émis, fin novembre 2006, neuf mandats d'arrêt contre des proches du président rwandais. Il avait aussi demandé au Secrétaire général des Nations unies de faire traduire Paul Kagame, qui jouit de l'immunité due à son statut de chef d'état, devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda.

Dans ce télégramme, le représentant américain rapporte que selon le juge Bruguière, « les neuf personnes qu'il a cité ne pourront pas quitter le Rwanda sans crainte d'une arrestation » mais « [Bruguière] doute que le TPIR prenne l'affaire». Le diplomate précise que « Bruguière a confirmé qu'il avait consulté le GoF [le gouvernement français] sur l'émission de mandats d'arrêt dans les affaires portées contre neuf proches collaborateurs du Président Kagame pour l'assassinat du Président Habyarimana et de trois français membres de l'équipage de l'avion. » Signé Stapleton, du nom de l'ambassadeur des Etats-Unis en France entre 2005 et 2009, le télégramme explique également que le juge français « a dit qu'il avait présenté sa décision à des officiels français, y compris au président Chirac » et qu'il a « choisi de les consulter parce qu'il était convaincu de la nécessité de coordonner cela avec le gouvernement.»

Visiblement loquace, le juge français ajoutait « qu'il n'était pas surpris par la réaction officielle du Rwanda et a déclaré que le GoF était préparé à une réponse violente contre des ressortissants français. Il s'est félicité de sa propre décision d'aller de l'avant, ajoutant que la communauté internationale avait "une certaine responsabilité morale ». Selon le diplomate américain,  « Bruguière a présenté son affaire d'une façon très professionnelle, mais il n'a pas caché son désir personnel de voir le gouvernement Kagame isolé. Il a averti que des liens plus étroits entre les Etats-Unis et le Rwanda serait une erreur ».   

SM/GF

© Agence Hirondelle