19.05.11-CPI/KATANGA - DES TEMOINS TENTENT DE CONSOLIDER LEUR DEMANDE D'ASILE POLITIQUE AUX PAYS-BAS

La Haye, 19 mai 2011 (FH) - Les trois témoins appelés par la défense de Germain Katanga au mois d'avril, et qui au terme de leur déposition avaient demandé l'asile politique aux Pays-Bas, ont transmis des éléments supplémentaires à la chambre de première instance, destinés à démontrer les risques encourus s'ils devaient être renvoyés à Kinshasa.

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Floribert Njabu, Pierre Mbodina et Charif Banda avaient témoigné en faveur de l'un des anciens commandants de la Force patriotique de résistance en Ituri (FPRI), Germain Katanga, poursuivi pour crimes contre l'humanité commis lors du massacre de Bogoro, le 24 février 2003. Au cours de leurs dépositions, les trois hommes avaient notamment affirmé que Kinshasa était impliqué dans le massacre, survenu lors d'une opération militaire destinée à reprendre l'Ituri, alors aux mains des miliciens de l'Union des patriotes congolais (UPC).

Floribert Njabu, ancien chef de milice, et Pierre Mbodina, ancien membre des services de renseignements congolais, sont détenus sans procès et sans charges précises à la prison centrale de Kinshasa depuis 2005. Charif Banda a été arrêté en septembre 2010. Leur avocat avait estimé que leur retour à Kinshasa les placerait « à la merci des autorités congolaises contre lesquelles ils ont témoigné », et qu'ils « risquent la mort ».

Le 17 mai, il a donc déposé une requête supplémentaire devant la chambre. Maître Ghislain Mabanga se réfère à un article publié sur le site internet de Radio Okapi, titré « Ituri : le colonel Richard Beiza arrêté à Kampala ». L'auteur de l'article explique qu'« il y a un mois, Richard Beiza, ancien de la milice Union des patriotes congolais (UPC) de Thomas Lubanga, avait accusé le gouvernement de la RDC dans certains médias, d'avoir été impliqué dans les massacres de Bogoro en 2002, pour lesquels Mathieu Ngujolo et Germain Katanga, (deux autres anciens miliciens de l'Ituri) sont actuellement poursuivis par la Cour pénale internationale ».   

Pour maître Matanga, cet article renforce sa thèse. « Les autorités congolaises prennent très au sérieux l'hypothèse, maintes fois évoquée par les témoins », d'être l'objet « de poursuites éventuelles sur ces faits », écrit l'avocat. Pour lui, Kinshasa procède à « l'élimination et la neutralisation systématiques des témoins potentiels à charge, y compris (...) lorsqu'ils se trouvent en dehors des frontières. »

Les trois témoins, qui auraient dû être reconduits à Kinshasa suite à leur déposition, sont toujours incarcérés à La Haye, en l'attente d'une décision des juges. La CPI n'est pas compétente pour se prononcer sur la demande d'asile, mais elle doit en revanche assurer la protection des témoins. Si les juges estiment que le retour des trois hommes à la prison de Makala, à Kinshasa, présente des risques, ils devront prendre des mesures.

Le 12 mai, la chambre avait invité les Pays-Bas à donner leur opinion sur la demande d'asile. Les autorités néerlandaises avaient estimé qu'elles n'étaient pas compétentes pour traiter une telle demande, et que la Cour devait, si elle estimait que le retour des témoins présentait des risques pour leur sécurité, s'adresser aux 114 Etats-parties à la CPI.   

En général, dans le cas de témoins qui ne sont pas détenus, la Cour peut « relocaliser » ceux qui encourent des risques, soit dans le même pays, soit à l'étranger. Des accords confidentiels, ont été passés par la Cour avec plusieurs Etats acceptant d'accueillir sur leur sol les témoins menacés. Mais rien n'est prévu pour les témoins détenus dans leur pays et appelés à déposer.

Le procès de Germain Katanga, co-accusé avec Mathieu Ngudjolo, a commencé le 24 novembre 2009.

SM/ER/GF

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