23.06.11 - CPI/ONG - POUR HRW, OCAMPO MANQUE DE COHERENCE DANS SES EXAMENS PRELIMINAIRES

La Haye, 23 juin 2011 (FH) - Dans un rapport publié mi-juin et intitulé « une trajectoire à rectifier », l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch (HRW) propose au procureur de la Cour pénale internationale (CPI) de renforcer sa politique d'examens préliminaires.

2 min 54Temps de lecture approximatif

Actuellement, le procureur conduit 9 examens préliminaires visant les crimes commis en Afghanistan, en Géorgie, en Côte d'Ivoire, en Colombie, au Honduras, en Guinée, au Nigéria, à Gaza et ceux commis en Corée du Sud par la Corée du Nord. Les examens préliminaires constituent l'étape préalable à l'ouverture éventuelle d'une enquête.

La menace d'une enquête nourrit deux autres objectifs de la Cour : punir et prévenir. Ainsi, les examens préliminaires doivent inciter les Etats à conduire des procès devant leurs propres tribunaux à l'encontre de responsables de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et de génocide. Ils visent aussi à dissuader les candidats aux crimes, comme ce fut le cas notamment en Côte d'Ivoire, où dès décembre, le procureur avait menacé de poursuivre les auteurs de violences.

Pour Elizabeth Evenson, juriste à Human Rights Watch, « l'ambitieuse promesse faite par le procureur de la CPI de se servir de son pouvoir de décider d'enquêter ou non pour inciter à la tenue de procès nationaux peut potentiellement s'avérer un outil important pour promouvoir la justice ». Mais Luis Moreno Ocampo devrait « maintenant se concentrer sur la mise en place de stratégies plus efficaces permettant d'y parvenir », affirme-t-elle.    

Dans son rapport rendu public le 16 juin, Human Rights Watch reproche au procureur de conduire une politique « incohérente ». Elle estime ainsi que les engagements du procureur sont variables. L'organisation cite notamment le cas de la Géorgie, où peu d'actions ont été engagées concernant le conflit russo-géorgien de l'été 2008 en Ossétie du Sud, alors que les deux Etats n'ont pris aucune mesure pour poursuivre les auteurs de crimes. En revanche, en Guinée, le Bureau du procureur a conduit plusieurs missions suite au massacre du 28 septembre 2009 au stade de Conakry, incitant les autorités à engager des procédures. Pour l'organisation, cette situation peut laisser entendre que Luis Moreno Ocampo est « motivé par des facteurs politiques ».

L'organisation reproche aussi au procureur la teneur de ses annonces publiques, qui « font naître l'attente » et créent des « espoirs frustrés » si aucune enquête n'est ouverte. Les menaces du procureur sont souvent non suivies d'effet, donnant l'impression qu'elles ne sont qu'une partie de « bluff ». Pour HRW, cela  pourrait « porter atteinte à la crédibilité et à la légitimité de la CPI ».

Considérés par les ONG comme une « épée de Damoclès », les examens préliminaires ne sont pas limités dans le temps. En Afghanistan, l'examen préliminaire est ouvert depuis 2006, depuis presque trois ans pour la Géorgie, et plus de deux ans pour Gaza. « A mesure que s'écoule le temps, note Human Rights Watch, les autorités risquent aussi de se désensibiliser à toute action imminente de la CPI ».

Et vu le nombre de situations en instance, « les autorités nationales peuvent juger que les chances que leur situation soit sélectionnée pour faire l'objet d'une enquête ne justifient pas un changement d'attitude de leur part ».

HRW suggère au procureur de rendre publics des rapports réguliers sur l'évolution des examens préliminaires. Ils permettraient de donner une vision précise de l'évolution de chaque situation et de pointer le manque d'engagement des Etats. L'ONG propose aussi que des échéanciers soient établis car « le fait de laisser ces analyses indéfiniment en souffrance ou alors de s'écarter trop de ce mandat principal en vue de possibles effets catalytiques ou dissuasifs ne sert pas la crédibilité » de la CPI.

SM/ER/GF

© Agence Hirondelle