De lundi à jeudi, la chambre présidée par le juge Dennis Byron, originaire de la Fédération des îles Saint-Kitts-et-Nevis, entendra les réquisitions du procureur et les plaidoiries des équipes de défense. Les accusés, à savoir l'ancien président du parti, Mathieu Ngirumpatse et l'ancien vice-président, Edouard Karemera qui avaient déjà donné leurs versions des faits lors de leurs témoignages, auront aussi une nouvelle occasion de s'adresser directement à leurs juges.
Un premier procès dans lequel les deux hommes comparaissaient avec l'ancien secrétaire général du MRND, Joseph Nzirorera et l'ancien ministre de l'Enseignement primaire et secondaire André Rwamakuba s'était ouvert en novembre 2003.
Mais en mai 2004, la présidente sénégalaise de la chambre, Andrésia Vaz, accusée par la défense d'apparence de partialité pour avoir eu l'imprudente générosité d'abriter momentanément sous son toit un membre du banc du procureur, est obligée de se récuser.
L'accusation en profite pour demander une disjonction d'instances, dans le but de modifier sa stratégie en se concentrant sur la thèse de la planification du génocide à la tête du MRND.
Un nouveau procès
La séparation accordée, Rwamakuba, qui était issu du Mouvement démocratique républicain (MDR), principal adversaire du MRND avant le génocide, sera jugé seul et acquitté le 20 septembre 2006. Il vit actuellement en Suisse où il a rejoint sa famille.
Pour leur part, les trois dirigeants du MRND reviennent au prétoire le 19 septembre 2005, dans le cadre d'un nouveau procès devant une nouvelle chambre.
Les débats avancent laborieusement, souvent ralentis par d'innombrables requêtes de la défense, en particulier de la part des avocats de Nzirorera.
Le 19 janvier 2007, en phase accusatoire, nouvelle péripétie : le juge ghanéen Emile Francis Short se retire « pour des raisons de santé ». Les juges restants - Dennis Byron et le Burkinabé Gustave Kam - décident de poursuivre et, un nouveau magistrat, le Danois Vagn Joensen, est désigné pour compléter le siège.
Mais en août 2008, Ngirumpatse, gravement malade, est hospitalisé à Nairobi. Faisant valoir son droit - consacré par la jurisprudence du TPIR - d'être physiquement présent à son procès, il n'autorisera que la tenue de quelques audiences en son absence.
Son état s'étant légèrement amélioré, il revient dans le prétoire le 19 octobre 2009, date de l'ouverture de la défense de Nzirorera. La chambre ne siège cependant qu'une partie de la journée car l'ex-président du MRND « n'est ni guéri, ni en voie de convalescence », selon l'un de ses avocats, le Français Frédéric Weyl.
Me Peter Robinson, l'avocat américain de Nzirorera, présente sa défense sur fond d'une bataille quasi-permanente avec la chambre qui lui demande sans cesse de réduire son nombre record de témoins, dont plusieurs condamnés ou accusés du TPIR.
Nzirorera échappe à la justice des hommes
Le 1er juillet 2010, le tribunal annonce la mort de Nzirorera. Deux semaines plus tard, il sera enterré en Belgique où vivent certains membres de sa famille.
Dans une décision rendue le 12 août, la chambre formalise l'extinction des poursuites engagées contre l'ingénieur civil qui laisse, devant la justice les juristes Ngirumpatse et Karemera.
Poursuivis pour crimes de génocide et crimes contre l'humanité, les deux hommes qui sont aussi d'anciens ministres du président Habyarimana, répondent surtout d'exactions perpétrées en 1994 par des membres de leur parti, en particulier les jeunes, les fameux Interahamwe du MRND. Ils sont donc poursuivis, pour l'essentiel, pour responsabilité de supérieur hiérarchique ; ce qu'ils ont réfuté, niant l'existence de tout lien de subordination entre eux et les auteurs matériels de ces crimes qui comprennent de nombreux viols de femmes et filles tutsies.
La chambre promet de trancher avant le 31 décembre.
ER/GF
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