« Je rêve de voir le peuple rwandais réconcilié avec lui-même. Ma détermination à y contribuer reste ferme. Peu importe ma situation actuelle », a déclaré l'ancien numéro du Mouvement républicain national pour la démocratie et la démocratie (MRND), le parti de l'ex-président Juvénal Habyarimana.
Jugé avec Edouard Karemera, l'ancien vice-président du MRND, Ngirumpatse est poursuivi pour crimes de génocide et crimes contre l'humanité. Les deux hommes répondent, pour l'essentiel, d'exactions perpétrées en 1994 par des membres de leur parti, en particulier, les jeunes, les fameux Interahamwe du MRND.
Assis devant les juges et lisant un texte préalablement préparé, Ngirumpatse, juriste de formation et ancien avocat, a appelé ses compatriotes à « promouvoir la démocratie et la liberté ».
« Nous pourrons alors chanter l'hymne de la fraternité retrouvée», a-t-il dit, refusant de « croire que la situation soit compromise à jamais » au Rwanda. Pour lui, le pays a besoin aujourd'hui d' « idées nouvelles, généreuses et universelles qui favorisent l'homme, qui mettent l'homme en avant ».
« La disparition des passions et des haines nous remettra sur les rails de la cohabitation pacifique. (...) Rien n'est impossible à un cœur généreux, animé d'une volonté inébranlable de faire le bien», a affirmé cet auteur-compositeur de musique grégorienne.
Il a rappelé avoir toujours tenu ce langage de paix et a invité la chambre à en tenir compte dans le secret de son délibéré.
Moins posé, son co-accusé, Edouard Karemera, a consacré l'essentiel du temps qui lui était accordé à pourfendre la partie adverse.
« Monsieur le Procureur, vous m'avez arrêté sans mandat, sans acte d'accusation et sans dossier à charge. Au moment de mon arrestation, vos services ignoraient jusqu'à mes fonctions en 1994 », a déclaré l'ancien dirigeant, également juriste.
Karemera a « regretté l'indifférence de la communauté internationale au moment crucial, son empressement à soutenir » l'actuel régime rwandais, « son acharnement contre les vaincus globalement et indistinctement traités de criminels parce qu'ils ont perdu la guerre».
Dénonçant les méthodes de l'accusation, il a terminé son intervention en appelant la chambre à le rendre aux siens. « Je vous demande de m'acquitter. Je vous supplie de constater, avec moi, que le procureur n'a pas prouvé ses accusations au-delà de tout doute raisonnable".
Le TPIR assure que le jugement sera rendu avant le 31 décembre prochain.
Les juges sont appelés à trancher sur deux questions essentielles qui sont revenues tout au long du procès : les accusés exerçaient-ils réellement un contrôle sur les milices Interahamwe ? Pouvaient-ils prévenir les crimes commis par ces miliciens ou en punir les auteurs ?
Karemera a été arrêté 5 juin 1998 au Togo et Ngirumpatse 6 jours plus tard au Mali.
Ce dernier procès collectif du TPIR, dans lequel ils comparaissaient avec l'ancien secrétaire du parti, Joseph Nzirorera décédé en juillet, a débuté le 19 septembre 2003.
ER/GF
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