29.08.11 - CPI/KENYA - LES JUGES DIRONT MARDI SI NAIROBI PEUT CONDUIRE LES DEUX PROCES

La Haye, 29 août 2011 (FH) - La chambre d'appel de la Cour pénale internationale (CPI) doit se prononcer, mardi 30 août, sur la demande du Kenya de récupérer, pour les juger sur son territoire, les cas de six de ses concitoyens actuellement en cours d'instruction à La Haye.

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Le Kenya souhaite obtenir l'autorisation de conduire l'enquête et les procès relatifs aux violences qui avaient suivi les élections de décembre 2007. Six responsables kenyans sont poursuivis par la CPI pour des crimes contre l'humanité commis lors de ces violences. Si la cour d'appel ne déclare pas mardi que ces cas sont irrecevables par la CPI, les audiences de confirmation des charges devraient débuter jeudi avec l'ancien ministre de l'Education William Ruto, l'ancien ministre de l'Industrie Henry Kogsey et l'homme de radio Joshua Arap Sang. Dans la seconde affaire, qui rassemble Uhuru Kenyatta, vice premier ministre, Francis Mathaura, directeur de Cabinet de la présidence et Ali Hussein, ancien chef de la police, les audiences sont prévues le 21 septembre.

Fin mai, les juges de première instance avaient débouté le Kenya, notamment parce que la proposition de Nairobi reposait sur la seule promesse de lancer, dans un futur proche, ses propres procédures.  

En vertu du "principe de la complémentarité", la Cour peut en effet s'emparer d'une affaire lorsqu'un Etat n'a pas la volonté politique ou les moyens logistiques de mener ses propres enquêtes et conduire les procès à l'encontre de responsables présumés de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

Avant d'ouvrir une enquête, le procureur doit cependant démontrer que le pays visé n'a pas les moyens ou la volonté de conduire lui-même les poursuites. Les juges de la CPI doivent ensuite valider l'analyse du procureur. Dans un document, le bureau du procureur précise que « l'examen de la recevabilité ne consiste pas à porter un jugement de valeur sur l'ensemble de l'appareil judiciaire national en question. Si aucune enquête ou poursuite n'a été menée dans le cadre d'un système judiciaire en état de fonctionner, c'est l'absence de procédure pertinente qui est le facteur déterminant ».

Dans le cas du Darfour, par exemple, le bureau du procureur avait estimé que malgré l'existence d'une cour spéciale chargée de juger les responsables de crimes de guerre, « aucune procédure n'avait été engagée au sujet des crimes commis à grande échelle au Darfour ».

D'autres critères sont aussi évalués, comme l'impartialité et l'indépendance des magistrats. Les poursuites engagées au niveau national doivent répondre aux principes de base du procès équitable, tel que les droits des accusés et la protection des témoins.

Le principe de complémentarité a conduit de nombreux Etats à modifier les codes pénaux afin de pouvoir, le cas échéant, contourner la menace de la CPI en jugeant leurs ressortissants devant leurs propres tribunaux. Après l'émission des premiers mandats d'arrêt de la Cour en 2007, contre un ministre et un chef de milice soudanais, Khartoum avait ainsi mis en place une cour spéciale. Le procureur, puis les juges, ont cependant estimé que ces procédures ne permettaient pas de juger les cibles du procureur, parmi lesquels le chef de l'Etat soudanais, Omar Al-Bachir.

Le Kenya, de son côté, a attendu de connaître les cibles de la CPI avant de s'engager, verbalement, à conduire les affaires sur son sol. Aujourd'hui, certains responsables du Conseil national de transition, l'organe politique des rebelles libyens, estiment que Kadhafi devrait être jugé à Tripoli. Pour y parvenir, ils devront prouver devant les juges de la Cour, comme tente de le faire Nairobi, qu'ils ont la capacité et la volonté de conduire des procès.  

Dans certains cas, comme en Colombie et en Guinée, le procureur n'a pas ouvert d'enquête, laissant au pays le temps de mettre en place ses propres procédures.

SM/GF

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