10.01.12 - FRANCE/RWANDA - ATTENTAT : LE RWANDA SE RÉJOUIT DES CONCLUSIONS DU RAPPORT BALISTIQUE

Paris, 10 janvier 2012 (FH) - Six experts - géomètres, balistique, explosifs, incendie et acoustiques - accompagnés des juges anti-terroristes Marc Trévidic et Nathalie Poux ont présenté mardi aux parties concernées les conclusions d'un rapport de 400 pages visant à établir la provenance des tirs de missiles ayant abattu, le 6 avril 1994, l'avion transportant notamment le président rwandais Juvénal Habyarimana.

3 min 4Temps de lecture approximatif

Durant trois heures et demie d'explications détaillées, ils se sont efforcés de lever un coin du voile dans la seule enquête judiciaire jamais menée sur l'attentat réputé avoir déclenché le génocide rwandais de 1994.

La réunion s'est tenue à huis clos dans une salle du palais de justice de Paris en présence de représentants des trois parties à l'instruction: des membres "directs" des familles des pilotes français victimes de l'attentat et leurs avocats, les deux avocats des membres du FPR mis en cause, et l'avocat de la famille du président Habyarimana.

Après avoir été commenté par les experts et les deux juges, le rapport a été remis aux parties, qui ont trois mois pour faire leurs observations. Les sept accusés du FPR restent pour l'heure mis en examen.

D'après les avocats et les proches du FPR mis en cause par Jean-Louis Bruguière, le premier des juges chargé de l'enquête en mars 1998, le rapport - dont le contenu n'a pas été officiellement rendu public - plaide sans équivoque en leur faveur.

"C'est une excellente nouvelle : des experts indépendants et compétents écartent de façon définitive toute responsabilité du Front patriotique rwandais (FPR) dans l'attentat [du 6 avril 1994]" a déclaré mardi à l'agence Hirondelle l'ambassadeur rwandais en France, Jacques Kabale.

"Masaka [où séjournaient les rebelles du FPR à Kigali en avril 1994] est exclu à 100 %, et Kanombé [où résidaient les Forces armées rwandaises] a été confirmé. L'avion a été abattu par les extrémistes Hutu sans aucun doute possible !", affirme encore Jacques Kabale, qui s'était rendu au Palais de justice de Paris aujourd'hui pour recueillir les premiers commentaires des avocats du FPR au sortir de la présentation à huis clos.

"Les résultats présentés aujourd'hui constituent la confirmation de la position tenue de longue date par le Rwanda sur les circonstances qui entourent les événements du mois d'avril 1994. Grâce à la vérité scientifique ainsi établie, les juges Trévidic et Poux ferment avec éclat le chapitre de ces 17 années de campagne visant à nier le génocide et à faire porter aux victimes la responsabilité de leur sort" a par ailleurs déclaré dans un communiqué Louise Mushikiwabo, Ministre rwandaise des Affaires Etrangères et porte-parole du gouvernement.

Bernard Maingain, l'un des avocats des membres du FPR, exprimait lui aussi sa satisfaction à la sortie de l'audition. "Nos clients ont été entendus. La défense a pu s'exprimer grâce au travail de deux magistrats très indépendants et très compétents. Tous les éléments que nous avons pu apporter ont carbonisé le dossier monté par le juge Bruguière, marqué par d'incroyables manipulations. Maintenant cette expertise est arrivée, qui devrait rapidement conduire au non lieu pour nos clients."

"Sur un certain nombre de points, les experts ont été catégoriques, reconnaît l'avocat de la veuve du président assassiné, maître Philippe Meilhac. Mais aujourd'hui, beaucoup de gens se réjouissent un peu vite. C'est un rapport qui demande approfondissement. Les experts avaient retenu six lieux possibles pour le départ du tir, et l'on sait que l'acousticien, arrivé sur le tard, a orienté de façon déterminante les conclusions des autres experts en optant pour l'option Kanombe".

Philippe Meilhac ajoute que le rapport ne sera définitif que quand les parties auront demandé et obtenu des compléments d'enquête.

"Mme Habyarimana n'a demandé qu'une chose : que justice soit faite. Alors à ceux qui chantent victoire aujourd'hui, je leur demande de nous aider à trouver qui a commis cet attentat !", conclut Me Meilhac.

FP/GF  

© Agence Hirondelle