25.11.13 - CPI/BEMBA - VERS UN PROCES DANS LE PROCES DE JEAN -PIERRE BEMBA

Arusha, 25 novembre 2013 (FH) – Alors que Jean-Pierre Bemba préparait l’allocution qu’il devait prononcer prochainement devant ses juges pour boucler solennellement sa défense devant la Cour pénale internationale (CPI), sa thèse vient d’essuyer un coup dur.

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Le sénateur congolais est soupçonné, avec deux membres de son équipe de défense, un de ses témoins et un député de son parti, de subornation de témoins. Dans un mandat d’arrêt délivré sans tambour ni trompette le 20 novembre, la Cour « a considéré qu’il y a des motifs raisonnables de croire que les personnes susmentionnées ont engagé leur responsabilité pénale en commettant des atteintes à l’administration de la justice », indique un communiqué de la CPI, évoquant « un réseau ». Bemba s’est vu notifier les nouvelles accusations le week-end dernier au quartier pénitentiaire de la CPI à La Haye, aux Pays-Bas, tandis que les forces de l’ordre des pays concernés cueillaient, sans difficultés, les quatre autres suspects, à Kinshasa et en Europe.

Jusqu’à cinq ans d’emprisonnement

Classé parmi les plus grosses fortunes de son pays, l’ancien vice-président congolais est le premier accusé de la CPI à être personnellement mis en cause pour entrave à l’administration de la justice. Jugé depuis novembre 2010 pour des crimes commis en Centrafrique en 2002 et 2003 par des combattants de son ancienne rébellion du Mouvement de libération du Congo (MLC), Bemba va donc se préparer à une nouvelle affaire, un procès dans le procès. En vertu de l’article 70 du Statut de Rome créant la CPI, toute tentative de subornation de témoins ou d’altération de preuves ou de production d’éléments de preuve faux ou falsifiés constitue une infraction. Une personne reconnue coupable de telles infractions encourt une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement ou une amende ou les deux. Dans cette nouvelle affaire, le richissime homme d’affaires congolais ne pourra cependant pas compter sur les services de son avocat préféré, Aimé Kilolo, également soupçonné de faire partie de ce « réseau » visant à interférer avec le cours de la justice. Maître Kilolo, qui a un cabinet en Belgique, a été arrêté à l'aéroport de Bruxelles, alors qu'il revenait de voyage.

Interpellé à son domicile

Quant à Jean-Jacques Mangenda Kabongo, un autre membre de l’équipe de la défense de Bemba, il a été arrêté en France tandis que le témoin Narcisse Arido a été appréhendé aux Pays-Bas. Des procédures propres à chaque pays d’arrestation sont en cours en vue de leur remise à la Cour. La durée dépendra des possibilités de recours prévues dans la législation de chaque pays. « Il est particulièrement inquiétant qu’une personne exerçant une profession juridique soit accusée d’avoir intentionnellement et systématiquement participé à des activités délictueuses visant à entraver l’administration de la justice », a souligné, dans un communiqué, la procureure de la CPI, Fatou Bensouda. Pour sa part, le député et secrétaire général adjoint du MLC Fidèle Babala Wandu,  a été interpellé à son domicile kinois dans la nuit de samedi à dimanche. Directeur de cabinet de Jean- Pierre Bemba lorsque ce dernier était vice-président (2003-2006), le parlementaire était attendu lundi au centre de détention de la CPI, à La Haye.

« Ce mandat d’arrêt doit servir d’avertissement »

Dans un communiqué publié dimanche soir, le MLC « dénonce (...) les conditions d'arrestation » qui, selon lui, violent les lois de la RDC et de la CPI. Il dénonce aussi « l'empressement » avec lequel Kinshasa a exécuté le mandat. Le gouvernement a répliqué qu’il s’était acquitté de ses obligations en tant qu’Etat partie au Traité de Rome.« Ce mandat d’arrêt doit servir d’avertissement à tous les auteurs d’infractions en puissance », a encore déclaré Fatou Bensouda. Le premier mandat de la CPI pour subornation de témoin a été émis  le 2 août et rendu public le 2 octobre. Il vise le journaliste kényan Walter Osapiri Barasa, soupçonné d’avoir tenté de soudoyer des témoins pour qu’ils renoncent à déposer contre le vice-président du Kenya, William Ruto, en procès depuis septembre. Le suspect n’a pas encore été arrêté.  Des condamnations pour interférence avec l'administration de la Justice ont été prononcées notamment par le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) et le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).ER