50 ans après la mort de Franco, des experts exhortent l'Espagne à légiférer sur les "bébés volés"

Des experts indépendants de l'ONU ont exhorté jeudi l'Espagne à adopter un projet de loi relatif aux "bébés volés" sous le régime franquiste, examiné par le Parlement espagnol depuis cinq ans.

"Malgré la douleur et les preuves croissantes des préjudices subis par les mères et les familles victimes de vols présumés de bébés en Espagne, l'absence d'un cadre juridique complet a empêché l'État d'apporter une réponse efficace aux victimes de ces crimes", ont déploré dans un communiqué ces experts, désignés par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU mais qui ne s'expriment pas au nom de l'organisation.

L'Espagne, qui marquait jeudi le 50e anniversaire de la disparition de Francisco Franco, a reconnu pour la première fois officiellement en 2022 comme victimes du franquisme les bébés enlevés à leurs familles durant la Guerre civile (1936-1939) et la dictature (1939-1975).

Mais un projet de loi initialement présenté en 2018 et examiné en 2020, a fait l'objet de multiples reports, tant pour ses amendements que pour son adoption définitive, rappellent les experts dans le communiqué.

Le texte prévoit la création d'un registre national des victimes, l'accès garanti aux archives et documents publics, la gratuité des tests ADN, la mise en place d'une unité d'enquête spéciale et la reconnaissance juridique du détournement d'enfants de leur famille biologique, de la falsification de documents et des disparitions forcées comme crimes contre l'humanité.

Il propose également une assistance psychologique et juridique gratuite aux familles, la promotion de campagnes d'information du public et le renforcement de la coopération entre les administrations régionales et les instances judiciaires, précisent les experts.

"Le projet de loi vise à rompre ce silence en établissant de véritables mécanismes de vérité, de justice, de réparation et de garanties de non-répétition", expliquent-ils, estimant que "depuis des décennies, des milliers de mères et de familles espagnoles sont privées du droit de connaître la vérité sur le sort de leurs enfants et le lieu où ils se trouvent, souvent victimes de disparitions forcées".

"Nous appelons l'Espagne à saisir cette opportunité d'agir dans l'intérêt supérieur des victimes et de la société dans son ensemble, et à faire adopter cette loi essentielle", ont-ils ajouté.

Durant la répression qui a suivi la guerre civile espagnole, des enfants avaient été soustraits à des républicaines accusées de leur transmettre le "gène" du marxisme. Mais cette pratique institutionnalisée avait ensuite touché, à partir des années 1950, des enfants nés hors mariage ou dans des familles pauvres ou nombreuses.

Il n'existe aucune estimation officielle du nombre de bébés volés en Espagne mais les associations de victimes parlent de plusieurs milliers d'enfants concernés.

Justice Info est sur Bluesky
Comme nous, vous étiez fan de Twitter mais vous êtes déçus par X ? Alors rejoignez-nous sur Bluesky et remettons les compteurs à zéro, de façon plus saine.
Poursuivez la lecture...