16.01.15 - TCHAD/JUSTICE - « LES AGENTS DE LA POLICE POLITIQUE D’HISSÈNE HABRÉ ÉTAIENT DES SUPERHOMMES »

Arusha, 16 janvier 2015 (FH) – Le procès des 21 Tchadiens poursuivis devant la justice de leur pays pour des crimes commis durant le régime de l’ancien président Hissène Habré (1982 - 1990) s’est poursuivi cette semaine.

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Selon l’organisation Human Rights Watch (HRW) qui suit de près cette affaire, le tribunal a entendu mercredi Mahamat Hassan Abakar, l’ancien président de la Commission nationale d’enquête qui avait été créée en 1992. Le témoin a affirmé que la Direction de la documentation et de la sécurité (DDS), la police politique de Habré, « torturait systématiquement et exécutait ».Il a ajouté que  « les agents de la DDS étaient des superhommes parce qu’ils jouissaient d’une impunité totale ». « Dès que la DDS vous arrête, vous n’avez aucun recours », a-t-il souligné. Selon HRW, beaucoup de personnes dans la salle d’audience ont fondu en larmes en regardant le film réalisé par la Commission, qui montre successivement les images des fosses communes, l’intérieur des prisons du régime Habré, les dessins des principales formes de torture ainsi que les visages émaciés des prisonniers libérés après la chute de l’ancien président. Depuis le début du procès, le 14 novembre dernier, une cinquantaine de victimes ont décrit les actes de torture et de mauvais traitements perpétrés par des agents de la DDS.     « Ce procès, c’est le rendez-vous du Tchad avec son histoire », a estimé Reed Brody, conseiller juridique et porte-parole de Human Rights Watch. « Pour la première fois depuis 24 ans, les violations systématiques du régime Habré sont présentées en audience publique », a ajouté l’activiste.    Josué Doumassem, l’un des survivants des geôles de la DDS, a décrit comment il avait été torturé à l’arbatachar.  Cette méthode de torture consiste à attacher les bras du supplicié à ses chevilles derrière le dos de manière à faire bomber sa poitrine, pendant plusieurs heures, entraînant une paralysie temporaire voire permanente.Par ailleurs, plusieurs femmes ont rapporté avoir été violées en détention.  Selon Mahamat Moussa Mahamat, un autre survivant, les cellules étaient souvent si pleines que les prisonniers ne pouvaient dormir qu’à tour de rôle. Clément Abaifouta, président de l’association des victimes, a décrit comment il avait été forcé d'enterrer les corps des détenus décédés dans des fosses communes. « Je témoigne au nom des morts », a-t-il déclaré à la barre. Ce procès, qui devrait se terminer à la fin du mois, se tient  alors que les Chambres africaines extraordinaires créées au sein de la justice sénégalaise sont en train de boucler l’instruction dans le dossier de l’ancien président Hissène Habré aujourd’hui incarcéré à Dakar.ER