000 d’entre eux ont été jugés, selon le Service national des juridictions gacacas (SNJG), l’organe gouvernemental chargé de superviser et de coordonner l’activité des ces tribunaux.
Le gouvernement rwandais s’était fixé pour objectif de terminer les procès gacacas au 31 décembre. L’essentiel du travail a été fait, de nombreuses juridictions gacacas ont terminé depuis longtemps, selon la Secrétaire exécutive du SNJG, Mme Domitille Mukantaganzwa. Là où le besoin se fera sentir un délai supplémentaire sera accordé, a-t-elle annoncé.
Le bilan chiffré force l’admiration de tous les observateurs si l’on sait que les juges gacacas sont bénévoles et que c’est seulement en juillet 2006 que les procès gacacas, d’abord ouverts dans quelques juridictions pilotes, sont entrés dans leur phase nationale de jugement. Mais, s’agissant de la qualité des jugements rendus, l’évaluation est loin d’être unanime.
Au terme d’un congrès extraordinaire tenu au début du mois à Kigali, Ibuka, la principale organisation de survivants du génocide, a formulé une kyrielle de critiques. Le collectif dénonce « l’intimidation de témoins à charge, l’incarcération de survivants, la protection d’intellectuels, de nantis ou de responsables accusés, une grande ingérence des responsables du Service national des juridictions gacacas dans le déroulement des procès (…) de nombreux cas de semblants de procédures judiciaires », etc.
Selon un participant à ce congrès, le débat a été virulent et le communiqué final ne réflète pas le ton général. Pourtant Ibuka y affirme que « les juridictions gacacas n’ont apporté qu’une faible contribution à la réconciliation des Rwandais car il y a de profondes inimitiés entre les témoins à charge et les accusés, une certaine déception, un sentiment de désespoir chez les rescapés du génocide qui estiment qu’ils n’ont pas eu droit à la justice qu’ils attendaient ».
Il n’en fallait pas plus pour faire sortir de son habituelle réserve le ministre de la Justice, Tharcisse Karugarama. «Le Service national des juridictions gacacas a enregistré des réalisations importantes dont tous les Rwandais devraient se réjouir », a réagi le ministre sur les ondes de Radio Rwanda.
Pour lui, « ceux qui voient les choses autrement sont des personnes jamais satisfaites ». Il a exhorté Ibuka à «éviter d’exagérer » et à ne pas faire de généralisation. Le responsable rwandais a rejeté les allégations d’ingérence des autorités dans l’activité des tribunaux gacacas. « Cela n’est pas vrai, ce n’est même pas possible », a-t-il affirmé, appelant Ibuka à ne pas dramatiser les choses.
Dans la même veine, la Secrétaire exécutive du SNJG a fait part de son « grand étonnement » dans une conférence de presse dans ses bureaux le lendemain. Après avoir rassuré les survivants du génocide, Mme Mukantaganzwa a par ailleurs rejeté d’une des critiques les plus souvent formulées par les organisations internationales des droits de l’homme : le manque d’assistance judiciaire devant ces juridictions qui peuvent prononcer jusqu’à la prison à vie alors qu’elles ne sont pas animées par des juges professionnels.
« Les droits de la défense sont garantis par les juridictions gacacas dans la mesure où toute personne qui souhaite prendre la parole en faveur d’un accusé a le droit de le faire », a rappelé Mme Mukantaganzwa. « En réalité devant les gacacas, l’accusé est défendu par plus d’un avocat », a –t- elle estimé, invitant ses concitoyens à ne pas nourrir de « complexe d’infériorité » par rapport au modèle occidental des droits de la défense.
Mettant ses détracteurs au défi de lui proposer une meilleure recette, le discours officiel à Kigali a toujours expliqué que le système gacaca est « une solution typiquement rwandaise à une problématique rwandaise».
PB/GF