Nous n’avons jamais rien reçu », a déclaré lors d’une conférence de presse Gilles Pinard. Son frère, le missionnaire Guy Pinard, vivait au Rwanda depuis près de 35 ans, lorsqu’il a été assassiné le 2 février 1997. Il finissait de célébrer la messe dans l’église de Kampanga, près de Ruhengeri (nord-ouest du pays).
«Il a été tué parce qu'il a été témoin de la mort de trois médecins espagnols, travaillant pour l'organisation Médecins du Monde. En outre, il avait découvert un charnier de 80 cadavres dans la cour de l'école du village où il oeuvrait. L'armée a voulu le faire taire », a dit son frère à la presse.
Selon l’avocat espagnol Jordi Palou-Loverdos, présent lors de la conférence de presse, l’instigateur du meurtre serait le lieutenant-colonel Karake Karenzi, chef des services de renseignement militaire à l'époque et aujourd’hui commandant adjoint de la Force de l'ONU et de l'Union africaine au Soudan.
Le nom de M. Karenzi figure sur la liste des quarante anciens haut gradés du FPR (Front patriotique rwandais, ancien parti tutsi du président du Rwanda Paul Kagamé) qui font l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par la justice espagnole en février 2008. Selon Me Palou-Loverdos, Interpol aurait été saisie de ce dossier depuis deux semaines.
Le père Claude Simard a quant à lui été assassiné à coups de marteau le 18 octobre 1994 à Ruyenzi (sud) où il résidait. Il revenait de Kigali où il avait informé les autorités rwandaises des disparitions et assassinats constatés dans sa commune de résidence.
Me Palou-Loverdos a déclaré à Montréal que la justice espagnole attribuait cet assassinat à Fred Ibingira, qui commandait alors le 157e bataillon de l'Armée patriotique rwandaise.
Pour l’avocat espagnol, qui représente des familles de Catalans et de Rwandais assassinés après le génocide de 1994, les deux prêtres canadiens ont été assassinés car « ils constituaient des témoins gênants, qui en savaient beaucoup sur les massacres qui avaient eu lieu dans les communes où ils vivaient ».
« Nous remercions le représentant de l'Espagne, qui nous fait un peu l'historique de toute cette tragédie, et nous espérons que le Canada en fasse autant », a dit Gilles Pinard.
Au moment ou se tenait cette conférence de presse, Maxime Bernier, le ministre canadien des affaires étrangères, visitait les troupes de l’ONU et de l’Union africaine déployées au Soudan. « Peut-être que Maxime Bernier va rencontrer le responsable de certains assassinats, mais je doute fort que M. Bernier ait le nom de Guy Pinard dans la tête », a poursuivi M. Pinard.
Contacté au Soudan par Le Journal de Montréal, le chef de la diplomatie canadienne a nié avoir rencontré Karake Karenzi. «Ce nom ne me dit rien », a-t-il dit. Il a cependant dit qu’il chargerait son cabinet de préparer un dossier concernant la mort des deux pères canadiens. «Je pourrai alors donner la position du gouvernement canadien», a conclu Maxime Bernier.
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