23.04.08 - BELGIQUE/RWANDA - NOUVELLE INTERDICTION A BRUXELLES D'UNE MANIFESTATION RWANDAISE

Bruxelles, 23 avril 2008 (FH) – Une manifestation controversée organisée par des associations rwandaises, qui devait avoir lieu mardi soir à Bruxelles, a été interdite par le bourgmestre de la ville pour « raisons de sécurité ». Cependant, la police a toléré mardi en fin d'après-midi devant le palais de justice la présence d'une trentaine de personnes avec une banderole, estimant qu'il s'agissait davantage d'un rassemblement que d'une manifestation.

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Regroupées sous le nom de SOCIRWA (Société civile rwandaise en exil), ces associations appelaient à manifester « en souvenir de toutes les victimes innocentes (Twas, Tutsis et Hutus) massacrées par des criminels rwandais d'octobre 1990 à nos jours ». Octobre 1990 est la date de la première offensive militaire du Front patriotique rwandais (FPR), alors rébellion en exil, sur le territoire du Rwanda.

Plus particulièrement, elles voulaient commémorer le massacre « de milliers de déplacés de guerre Hutus (...) à Kibeho (Sud du Rwanda) par l'Armée du Front patriotique rwandais (FPR) entre le 17 et le 24 avril
1995 », notamment de 8000 d'entre eux « dans la seule journée du 22 avril 1995 », selon l'invitation lancée au nom de la SOCIRWA.

Le FPR est le parti du président Paul Kagame, au pouvoir au Rwanda depuis la fin du génocide de 1994 qui a fait plus de 800 000 morts selon l'Onu, essentiellement parmi la minorité Tutsi.

La Communauté rwandaise de Belgique (CRB) a condamné « avec véhémence » la manifestation prévue mardi, qu'elle qualifie de « fausse commémoration » qui « [visait] ni plus ni moins à minimiser le génocide commis contre les Tutsis du Rwanda dans le souvenir supposé de toutes les victimes Twa, Tutsi, et Hutu d'un génocide qui serait rwandais et en inversant les responsabilités ». «Ceci est d'autant plus choquant que [...] les organisations à l'origine de cette manifestation sont connues pour leur proximité et leur sympathie à la cause du Hutu Power qui a planifié et exécuté le génocide des Tutsi », ajoute le communiqué.

Selon la CRB, ces organisations se servent de la thèse du « double génocide » pour véhiculer un « négationnisme pur et dur ». Elle a demandé l'interdiction de la manifestation dans un courrier adressé au bourgmestre Freddy Thielemans (PS).

Le 6 avril dernier, une autre manifestion qualifiée de « négationniste » par l'association de rescapés Ibuka et par la CRB, organisée en réponse aux commémorations officielles du génocide prévues le 7, avait déjà été interdite par le bourgmestre. Une soixantaine de personnes qui s'étaient néanmoins réunis ce jour-là avaient fait l'objet d'une arrestation administrative par la police de Bruxelles.

Le porte-parole du bourgmestre a confirmé que les organisateurs réunis sous le nom de SOCIRWA étaient les mêmes que ceux qui ont tenté de monter la manifestation non autorisée du 6 avril, dont Joseph Matata, du Centre de lutte contre l'impunité et l'injustice au Rwanda (CLIIR), qui signe communiqués et invitations.

Selon le porte-parole, l'interdiction aurait été justifiée par des « raisons de sécurité » : les présidents de la Chambre et du Sénat belges recevaient hier, pour une concertation parlementaire sur la situation dans la région des Grands Lacs, leurs homologues du Burundi, de la RDC et du Rwanda, a-t-il expliqué à l'agence Hirondelle.

Sans se prononcer sur le fond, il a également rappelé que seul le négationnisme de la Shoah était pénalement réprimé en Belgique, depuis 1995. La CRB et Ibuka militent pour l'élargissement de cette loi au négationnisme du génocide des Tutsis du Rwanda.

BF/PB/GF