Le politicien belge a indiqué qu’il avait des contacts réguliers avec des dirigeants de l’ex-parti au pouvoir au Rwanda dans les années 1990. Dans ce cadre il a rencontré à plusieurs reprises Edouard Karemera et ses coaccusés.
Il a décrit Karemera comme quelqu’un qui a apporté « une nouvelle culture politique » au Rwanda en sa qualité de président de la « Commission nationale de synthèse », qui a proposé de profondes réformes politiques dont l’introduction du multipartisme et des libertés fondamentales en 1991.
« C’était un homme d’une très grande ouverture » politique, a souligné Alain de Brouwer, donnant notamment comme preuve une interview que l’accusé avait accordée à un journal panafricaniste de Bruxelles en 1991. « Nous Rwandais, nous avons la même culture, la même langue (qui est très complexe d’ailleurs), les mêmes traditions, nous devons absolument sauvegarder cette unité nationale », y disait Karemera.
Alain de Brouwer a ajouté que Karemera avait appelé au dialogue politique au Rwanda et à la renonciation à la guerre. Le gouvernement était alors en guerre avec les rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) actuellement au pouvoir à Kigali. Karemera disait que « le FPR peut trouver dans le multipartisme entièrement sa place », a indiqué le témoin.
Les coaccusés de Karemera sont Mathieu Ngirumpatse et Joseph Nziororera, respectivement président et secrétaire général de l’ex-parti au pouvoir au Rwanda, le Mouvement républicain national pour la démocratie et le développement (MRND).
Alain de Brouwer a dit de Ngirumpatse qu’il avait à son actif l’introduction des lois d’amnistie alors qu’il était ministre de la justice en 1991. En ce qui concerne Nzirorera, il a salué sa détermination « de continuer à soutenir les accords d’Arusha et leur application envers et contre tout ».
Les accords de paix d’Arusha ont été signés en août 1993 entre le gouvernement rwandais et le FPR. Ils n’ont jamais été mis en œuvre en raison du déclenchement du génocide en avril 1994.
Le procureur affirme que Nzirorera faisait partie des politiciens extrémistes, opposés à ces accords qui prévoyaient notamment le partage du pouvoir entre les principales forces politiques du pays.
Appelée "Karemera et autres", cette affaire qui a du être rejugée, a commencé en septembre 2005. Elle devrait se poursuivre au-delà du 31 décembre, date prévue pour la fin de tous les procès en première instance.
Poursuivis pour génocide et crimes contre l’humanité, les accusés plaident non coupable. Ils sont détenus depuis une dizaine d'années.
Alain de Brouwer a commencé sa déposition lundi. Il la poursuivait mardi après-midi. Son dernier témoignage au TPIR remonte à février dernier. Il avait été cité par les avocats de l’ancien chef d’état-major de la gendarmerie rwandaise, le général Augustin Ndindiliyimana.
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